Présence de plomb dans l’eau : deux poids, deux mesures au Yukon

Certaines fontaines d’eau ont été condamnées et les élèves doivent apporter leur bouteille d’eau de la maison dans certaines écoles où la présence de plomb est trop importante. (Radio-Canada/Richard Marion)

Le ministère de l’Éducation dit travailler pour que l’eau potable des écoles du Yukon respecte les normes canadiennes concernant la quantité de plomb, plus de cinq ans après une révision de Santé Canada.

Le gouvernement territorial a récemment révisé les rapports d’analyses d’eau potable datant de 2018 et 2019 et a découvert que «plus de tests et de possibles décontaminations» seront nécessaires dans une trentaine d’écoles du territoire, afin que celles-ci respectent les normes sanitaires établies par le fédéral en mars 2019.

Cette révision est survenue après que deux élèves de l’École Del-Van-Gorder de Faro, Lilou Lefebvre et Olive Passmore, ont trouvé du plomb dans l’eau de leur école dans le cadre de leur projet pour la foire scientifique.

Le taux élevé de plomb dans l’eau de cette école est d’ailleurs ce qui, en 2018, avait poussé le gouvernement du Yukon à effectuer des analyses et des réparations.

Lilou Lefebvre et Olive Passmore se sont qualifiées pour l’expo-sciences pancanadienne qui aura lieu à Ottawa au mois de mai. (CBC/Elyn Jones)

Le directeur par intérim des opérations du ministère de l’Éducation, Jayme Curtis, a confirmé que c’est bien la découverte des deux élèves qui a mené à la révision des résultats des analyses et qu’un entrepreneur externe a été engagé depuis pour tester l’eau de toutes les écoles du territoire.

Le ministère de l’Éducation utilise deux normes différentes

Dans ses courriels envoyés aux parents et dans ses messages publics du mois dernier, le ministère de l’Éducation a fait plusieurs fois référence aux Recommandations pour la qualité de l’eau potable au Canada, tout en suivant plutôt, et jusqu’à tout récemment, un autre document de Santé Canada, intitulé Document de conseils sur le contrôle de la corrosion dans les réseaux de distribution d’eau potable.

Dans ce dernier, les normes permettent une concentration plus élevée de plomb dans l’eau potable des bâtiments non résidentiels, soit une quantité maximale de 0,02 mg/l.

La concentration de plomb est cependant moins élevée dans les Recommandations pour la qualité de l’eau potable au Canada qui, jusqu’en mars 2019, permettait une concentration allant jusqu’à 0,01 mg/l. Depuis, elle a été réduite, passant à 0,005 mg/l.

Le porte-parole du ministère de l’Éducation, Michael Edwards, a confirmé que le Yukon se conformait plutôt aux normes concernant la corrosion : «C’est une décision commune prise par le ministère de l’Éducation et le médecin hygiéniste en chef, basée sur les directives disponibles à l’époque.»

En effet, l’équipement utilisé pour les analyses de 2018 permettait uniquement de détecter une concentration minimum de 0,02 mg/l de plomb, et le reste était indiqué comme étant uniquement sous la limite. Il était donc impossible de savoir si l’eau potable respectait la norme de l’époque de 0,01 mg/l.

Dans un courriel envoyé aux parents, ce mois-ci, le gouvernement a toutefois amalgamé les deux normes différentes en indiquant que les analyses effectuées en 2018 «ont servi à s’assurer que l’eau respectait les Recommandations pour la qualité de l’eau potable au Canada».

Les nouvelles analyses et réparations doivent être terminées avant la rentrée 2024-2025. Jayme Curtis indique que, d’ici là, toutes les fontaines d’eau dans lesquelles on a détecté une concentration trop élevée de plomb ont été fermées et que les élèves sont encouragés à apporter de l’eau embouteillée.

Ailleurs, les employés ont été informés qu’ils devaient «faire couler» l’eau des fontaines pendant cinq minutes chaque matin, même si, selon le Document de conseils sur le contrôle de la corrosion dans les réseaux de distribution d’eau potable, cela peut «ne pas suffire pour abaisser les teneurs de plomb et de cuivre sous les seuils prescrits».

L’opposition veut des réponses

Le comité de l’École élémentaire Selkirk, à Whitehorse, a envoyé une lettre à la ministre de l’Éducation, Jeanie McLean, s’interrogeant sur l’absence de mesures en lien avec la gestion de l’eau potable dans les écoles.

«Ce sont nos enfants, n’est-ce pas? Et les enseignants, les administrateurs, tous les adultes qui travaillent dans ces écoles, est-ce que ça va devenir un problème pour eux à long terme», demande Melanie Davignon, qui fait partie du comité.

Le niveau élevé de plomb dans l’eau de l’École Del-Van-Gorder avait poussé le gouvernement du Yukon à effectuer des analyses en 2018. (CBC/Paul Tukker)

Les partis d’opposition exigent également des réponses. Si le Parti du Yukon félicite les deux élèves de Faro d’avoir ramené la question à l’avant-plan, le député Stacey Hassard remet en question la volonté d’agir du gouvernement.

«C’est intéressant et un peu effrayant que ce soit [la découverte des deux élèves] qui a poussé le gouvernement à agir finalement», dit-il.

Selon la cheffe du Nouveau Parti démocratique du Yukon, Kate White, le gouvernement doit assumer sa responsabilité et, maintenant que la question a refait surface, elle s’attend à ce «que des mesures concrètes soient prises pour résoudre cette affaire».

De son côté, le médecin hygiéniste en chef du Yukon, le Dr Sudit Ranade, rappelle qu’une courte exposition à des niveaux plus élevés de plomb n’entraîne pas de risque de «toxicité aiguë». Il ajoute qu’il est en discussion avec le ministère de l’Éducation pour déterminer les prochaines étapes.

«Pour le moment, je dirais que ce n’est pas une urgence, mais que c’est quelque chose qui demande à ce qu’on agisse», dit-il.

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