Le cadre juridique canadien jugé insuffisant pour protéger les océans contre le bruit

Des narvals dans l’océan Arctique. (iStock/CoreyFord)

Les outils juridiques dont dispose le Canada pour limiter le bruit sous-marin ne sont pas efficaces. Il s’agit de la conclusion d’un rapport préparé pour le Fonds mondial pour la nature (WWF-Canada) par deux firmes environnementales canadiennes. 

Selon les firmes East Coast Environmental Law et West Coast Environmental Law, certaines parties des océans sont jusqu’à 100 fois plus bruyantes qu’à l’état «naturel». 

Le rapport, intitulé La stratégie sur le bruit dans les océans du Canada : une analyse des lois et des politiques, met en lumière que «le bruit dans les océans n’est pas explicitement incorporé aux lois et règlements existants relatifs à la conservation marine ni aux lois régissant les industries qui opèrent dans l’océan».

Selon les auteurs, «le gouvernement fédéral doit accélérer le pas pour créer une stratégie globale afin de protéger les espèces et les écosystèmes marins».

Stephanie Hewson, avocate-conseil à West Coast Environmental Law, explique que «l’analyse montre que le Canada est en mesure de promulguer des lois pour un océan silencieux, qui comprennent des limites juridiquement contraignantes sur le bruit sous-marin».

L’Arctique plus «calme»… pour le moment

Le spécialiste principal de la conservation marine au WWF-Canada, Hussein Alidina, affirme que le bruit dans nos océans est en constante augmentation et que l’approche de protection de la vie marine actuelle n’est pas suffisante. 

Le rapport indique que, particulièrement sur la côte ouest, l’oléoduc Trans Mountain, le terminal de gaz naturel liquéfié à Kitimat prévu pour 2025 et un terminal d’exportation de gaz propane qui devrait être opérationnel en 2026 contribueront tous à l’augmentation du trafic maritime et du bruit sous-marin. 

On peut également y lire une inquiétude notoire au sujet de la région arctique qui, pour le moment, est encore calme, selon les auteurs du rapport. Ils rappellent toutefois que les dérèglements climatiques créent de nouvelles routes commerciales dans la région et que, là aussi, le trafic et le bruit sont en voie d’augmenter rapidement. 

Le brise-glace Amundsen navigue dans le passage du Nord-Ouest. (Getty)

Des outils sous-exploités

L’analyse conclut que les outils dont le Canada dispose déjà pour protéger les environnements sonores sous-marins, comme des aires marines protégées (AMP), des lignes directrices sur la qualité du milieu marin (QMM) ou en vertu de la Loi sur les océans, de la Loi sur les pêches, de la Loi sur la marine marchande du Canada et la Loi sur les espèces en péril sont sous-utilisés. 

Les outils juridiques dont nous disposons actuellement, même s’ils étaient utilisés à leur plein potentiel, n’offrent qu’une solution temporaire. Ce dont nous avons besoin est une solution à long terme qui réglemente véritablement la pollution sonore sous-marine.

– Hussein Alidina, spécialiste principal de la conservation marine au WWF-Canada

 

Dans le document, plusieurs recommandations sont émises par les firmes en droits environnementaux à l’origine du rapport :

  • la fixation de normes régionales et sous-régionales qui imposent des seuils de bruit;
  • la mise en place de mesures concrètes de réglementation et de gestion pour les AMP qui limitent les activités génératrices de bruit et préservent l’habitat acoustique des espèces marines en péril;
  • l’élaboration de seuils de bruit quantitatifs et de cibles de réduction pour les habitats de toutes les espèces aquatiques en péril répertoriées qui ont besoin d’environnements sonores silencieux pour leur rétablissement;
  • l’imposition de limites de réduction de bruit en fonction de la région pour les projets côtiers et en mer;
  • l’obligation de prendre en compte le bruit dans les évaluations environnementales;
  • la réglementation des seuils de bruit, l’imposition de zones à éviter et de mesures d’atténuation telles que la vitesse maximale des navires, les restrictions et les technologies silencieuses. 

Le rapport conclut en indiquant que ces recommandations ne sont que «des éléments d’une stratégie globale, qui est nécessaire pour s’attaquer véritablement aux impacts du bruit sous-marin.»

Pêches et Océans Canada (MPO) affirme que la publication provisoire de sa Stratégie canadienne sur le bruit dans les océans est prévue pour 2024 et qu’elle sera «conçue pour aider à orienter et à soutenir une meilleure coordination des efforts fédéraux sur toutes les sources de bruit océanique».

Une période de mobilisation du public suivra cette publication provisoire grâce auquel un plan d’action sera établi. Une publication officielle de la stratégie sera ensuite faite en 2025.

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