Un aîné du Nunavut construit une hutte de terre traditionnelle

Un aîné du Nunavut a construit une hutte de terre traditionnelle similaire à celle dans laquelle il a vécu durant son enfance, il y a six décennies.
Laimiki Innuaraq se souvient très bien d’avoir vécu dans une hutte de terre traditionnelle inuit, ou qammaq, de 1943 à 1963.
Une hutte de terre, avec un seul qulliq (une lampe à huile traditionnelle), suffisait à le garder au chaud même pendant les hivers les plus rudes.
Laimiki Innuaraq se souvient encore des petits détails : l’arôme de la bannique fraîche après une journée de travail ou les aboiements excités de ses qimmiit (chiens de traîneau).
Aujourd’hui, six décennies plus tard, il a recréé une habitation similaire à celle de son passé, pas loin de Sanirajak. Il l’a achevée en quelques semaines à la force de ses mains avec une pelle, un couteau et une hache.

Il dit avoir été ému lorsqu’il a mis la dernière touche à la nouvelle maison.
J’ai commencé à verser des larmes.
M. Innuaraq raconte qu’il a construit une hutte de terre pour que sa femme et les autres membres de la communauté aient un endroit où coudre. Contrairement aux maisons modernes, la hutte de terre est un endroit idéal pour coudre des peaux de caribou, de phoque et d’ours polaire.
Les huttes de terre d’autrefois reposaient en grande partie sur des os d’animaux, comme ceux des baleines boréales, pour la charpente.
Il dit qu’il a trouvé du bois de rechange pour construire cette nouvelle hutte, mais qu’il a continué à utiliser des pierres plates pour les fondations, ainsi que des peaux de caribou et de la terre pour l’isolation, tout comme il l’avait fait pour sa première habitation.
Fouilles archéologiques en cours
Par ailleurs, des chercheurs et des organisations inuit locales travaillent à la découverte de huttes de terre historiques à Cambridge Bay. C’est le cas de Max Friese, professeur d’archéologie à l’Université de Toronto, qui fait des recherches sur les huttes de terre dans l’Arctique depuis 1986.
Il pense que les huttes de terre de l’Inuit Nunangat sont apparues il y a environ 800 ans, bien qu’elles remontent probablement à plus de 2000 ans avant cela, avec les Tuniit, et peut-être à 10 000 ans dans des endroits comme l’Europe et la Sibérie.
Le professeur Friesen collabore avec Pitquhirnikkut Ilihautiniq (Kitikmeot Heritage Society) pour fouiller les huttes de terre près de Cambridge Bay depuis plusieurs décennies et pour recueillir les témoignages des anciens.
Emily Angulalik, directrice de l’association, se souvient encore de la vue d’une grande hutte de terre découverte en 2004. D’après leurs recherches, elle aurait été habitée par plusieurs Thuléens.
Je suis impressionnée par la façon dont nos Inuit ont vécu pendant des milliers d’années.
Travailler sur ces fouilles aide la communauté, et notamment les jeunes, à être fière de sa culture, et les anciens, à se remémorer de puissants souvenirs.
Lorsque le professeur Friesen découvre les objets et les présente à nos aînés, leurs histoires leur reviennent à l’esprit. C’est comme une vidéo que l’on rembobine dans leur esprit , souligne Emily Angulalik.

Le dérèglement climatique, une menace croissante
Bien qu’il est important de mener de telles recherches comme le soutient Emily Angulalik, il reste que ce travail se heurte à une menace croissante : le changement climatique.
L’élévation du niveau des mers et des rivières et l’allongement des périodes d’eau libre peuvent provoquer l’érosion des sols.
Pour les huttes de terre situées plus à l’intérieur des terres, la menace réside dans le réchauffement du sol, explique le professeur Friesen.
Dans de nombreuses régions, le permafrost, le sol gelé en permanence, commence à dégeler, explique Max Friese, chercheur sur les huttes traditionnelles. Cela signifie que la terre se détache.

Entre 2013 et 2017, le professeur Friesen a fait partie d’un groupe qui a creusé des huttes de terre beaucoup plus grandes dans la région d’Inuvialuit.
Nous avons visité 30 ou 40 sites différents, et chacun d’entre eux était touché à un degré ou à un autre par l’érosion. Dans quelques cas, nous savions qu’un site avait existé dans le passé, mais il avait complètement disparu, a-t-il indiqué.
Il pense qu’il pourrait y avoir une demi-douzaine de sites près de Cambridge Bay qui sont menacés par l’érosion. Il faudra donc discuter de la manière de poursuivre ce travail tant qu’il est possible de le faire.
Voulons-nous, par exemple, fouiller quelques-uns de ces sites avant qu’ils disparaissent, ou voulons-nous nous contenter de les documenter?
Avec les informations de Samuel Wat et de Karen Pikuyak
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