La santé mentale, grande oubliée de la campagne électorale canadienne

Au moins 20 % de la population canadienne déclare éprouver des problèmes de santé mentale. (iStock)
Steven Venegas, de Vancouver (côte ouest du Canada), a reçu un diagnostic d’anxiété grave et de dépression en plus d’un stress post-traumatique à la suite d’un cancer. Aujourd’hui, dit-il, une prise en main grâce à de la thérapie et des médicaments l’ont sauvé, mais le soutien financier en matière de santé mentale reste insuffisant dans la province de la Colombie-Britannique.

« Mes amis me disent qu’ils n’ont pas l’argent pour se permettre d’aller en thérapie », déplore-t-il. « À Vancouver, une ville où le coût de la vie est déjà élevé – le loyer gobe la moitié du salaire -, c’est dur de trouver l’argent nécessaire pour une consultation : j’ai moi-même hésité pour des raisons financières. »

Le réalisateur de CBC et humoriste à ses heures peut bien rire de son cancer ou de la santé mentale, mais il n’en a pas toujours été ainsi.

Le réalisateur Steven Venegas estime qu’il faut en faire plus pour la santé mentale au Canada. (Anaïs Elboujdaïni/Radio-Canada)

À son avis, l’absence de couverture médicale universelle en ce qui concerne certains aspects de la santé mentale, comme consulter à faible coût un psychologue, est une barrière à laquelle doivent s’attaquer les politiciens à l’échelle nationale.

Et il n’est pas le seul. L’Association canadienne pour la santé mentale (ACSM) veut voir plus de mesures concertées pour que les Canadiens atteints de problèmes de troubles psychologiques puissent obtenir de meilleurs soins.

L’ACSM est catégorique : elle demande la création d’une loi sur la parité en santé mentale qu’elle a formulée par ailleurs l’an dernier.

Cette loi exigerait que les services en santé mentale et en santé physique soient traités de la même façon.

Pour Geneviève Fecteau, directrice générale pour l’ACSM à la filiale de Québec, les partis doivent s’engager clairement en ce sens : « On a la ferme intention de revenir sur cette demande-là et d’en faire notre principale position pour tous les partis qui sont dans la course. »

Des attentes dans les communautés isolées du Nord canadien

Les appels pour une reconnaissance de l’importance d’investir dans le domaine de la santé mentale dépassent les organismes qui travaillent dans le domaine.

Conférencière lors d’un sommet sur le leadership autochtone au féminin, Tanya Snowhoe, une jeune militante des Territoires du Nord-Ouest, dans le Nord canadien, appelle ainsi les chefs des partis fédéraux à investir dans sa communauté.

Tanya Showshoe, des Territoires du Nord-Ouest, s’inquiète du manque flagrant de services en santé mentale dans sa communauté. (Daniel Beauparlant/Radio-Canada)

« On ne va pas chercher des services de thérapie. J’hésite moi-même à aller consulter une psychologue, parce que c’est tellement facile de croiser par hasard tout le monde au supermarché, par exemple », avance-t-elle.

Véronique Lachance, une artiste de Whitehorse, ville du nord-ouest du Canada, déplore la fermeture du seul organisme non gouvernemental au territoire à offrir des services de soutien psychologique gratuit : « La communauté en subit les impacts. Ce sont des impacts majeurs puisque l’organisme pouvait soutenir des centaines de personnes à travers le territoire. Nous devrions en entendre parler [davantage]. »

« Offrir des services d’aide pour la santé mentale facilement accessibles devrait être considéré comme une priorité nationale. »

Véronique Lachance, artiste et résidente du Yukon

Bien que de compétence provinciale, le portefeuille de la santé en général reçoit un financement d’Ottawa en vertu du Règlement sur le transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux.

« Quand le gouvernement fédéral a la responsabilité de mettre la table et de mettre à la disposition de ses provinces une approche et un système pour que chaque province puisse cibler les priorités de la société », rappelle Geneviève Fecteau.

Des organismes comme l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) estiment que l’impact de la santé mentale a aussi des conséquences négatives sur l’économie. Selon un rapport de 2014, les coûts directs et indirects de la santé mentale s’élevaient à 4,4 % du PIB canadien.

Or, l’OCDE affirme que les investissements de ses pays membres ne sont pas encore suffisants.

Pour l’heure, le Canada consacre 7,2 % de ses dépenses de santé aux services en santé mentale, un taux jugé insuffisant pour répondre à la demande, selon l’OCDE.

Santé mentale : l’engagement des partis fédéraux

PARTI CONSERVATEUR

Le Parti conservateur rappelle qu’il continuera d’appuyer les investissements dans la santé mentale.

« Notre gouvernement conservateur précédent a fait de multiples investissements, notamment la création de la Commission de la santé mentale du Canada dans le budget de 2007, l’octroi de 110 millions de dollars dans le budget de 2008 et la prolongation de son mandat de 10 ans dans le budget de 2015 », soutient le parti dans un courriel à Radio-Canada.

NOUVEAU PARTI DÉMOCRATIQUE

Pour le NPD, la santé mentale doit être comprise dans l’offre de couverture de santé.

« Un gouvernement néo-démocrate élaborera une stratégie nationale sur la santé mentale qui coordonnera mieux les ressources et fera en sorte que les investissements fédéraux ciblent les populations à risque élevé », dit le NPD dans un courriel.

Le parti souhaite consacrer des fonds pour former une stratégie contre le suicide dans les communautés autochtones.

PARTI LIBÉRAL

Le Parti libéral souhaite dans sa plateforme bonifier les fonds pour la santé mentale, en établissant « des normes nationales claires en matière d’accès aux services de santé mentale ».

Les libéraux veulent offrir jusqu’à 3000 $ en services de santé mentale gratuit pour les vétérans.

Ils veulent également augmenter les avantages sociaux au travail, pour permettre d’alléger la charge de travailleurs qui « craignent de parler de problèmes de santé mentale qui peuvent avoir une incidence sur leur travail ».

PARTI VERT

Dans sa plateforme, le Parti vert reconnaît l’importance de s’occuper des problèmes de santé mentale et parle des conséquences environnementales sur celle-ci.

Le Parti vert ajoute qu’il « réorientera le mandat de Santé Canada pour englober la santé mentale, les problèmes de toxicomanie ». La formation politique souhaite aussi établir une stratégie nationale sur la santé mentale et une stratégie de prévention contre le suicide.

PARTI POPULAIRE DU CANADA

Le PPC considère que la santé, « y compris la santé mentale, est un domaine de compétence exclusivement provinciale ». Dans un courriel, le PPC dit s’opposer à la mise en place d’une stratégie nationale par Ottawa en matière de santé mentale.

BLOC QUÉBÉCOIS

Le Bloc québécois est d’avis que le Québec serait mieux servi en étant seul responsable de sa stratégie nationale en santé mentale.

Anaïs Elboujdaïni, Radio-Canada

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