Distance, coûts et météo : les défis de faire campagne dans le Grand Nord canadien

Les candidats qui s’affrontent pour décrocher l’unique siège de député fédéral qui revient aux Territoires du Nord-Ouest doivent braver les distances, les coûts de voyage importants et la météo qui joue souvent en leur défaveur pour visiter les électeurs ténois au cours de cette campagne électorale fédérale.
Avec une circonscription de 1,5 million de kilomètres carrés, une campagne électorale aux Territoires du Nord-Ouest peut facilement se résumer à un périple.
Une météo automnale capricieuse, des coûts de déplacement prohibitifs et une campagne électorale brève signifient que les candidats doivent faire preuve de débrouillardise pour rejoindre les 44 500 résidents du territoire. « Beaucoup de candidats du sud estiment que 40 jours, c’est beaucoup de temps. Pour nous, ce n’est pas le cas », lance le député libéral Michael McLeod, qui espère visiter 25 communautés au cours de cette campagne.

Mary Beckett, propriétaire d’une petite entreprise d’Inuvik (nord-ouest du territoire) et candidate du Nouveau Parti démocratique, saute sur toutes les occasions de se présenter aux potentiels électeurs, surtout si elle n’est pas certaine de leurs sensibilités politiques. « Je suis restée quelques heures à la salle de bingo d’Aklavik [à l’ouest d’Inuvik] pour parler aux filles qui vendaient des billets », a-t-elle déclaré.
La planification des arrêts de campagne devient alors une forme d’art.
La candidate dit essayer néanmoins de se rendre dans chaque région dans la mesure du possible. La météo étant un facteur déterminant, il n’est pourtant pas recommandé de débarquer dans une petite ville un week-end par beau temps, car la plupart des gens ont délaissé leurs maisons au profit de la nature.
La capitale, épicentre de la campagne

La néo-démocrate a planifié sa campagne autour de quatre débats à Yellowknife. Paul Falvo, un avocat de Yellowknife qui représente le Parti vert, s’étonne de l’absence de débats à l’extérieur de la capitale. Il l’attribue à la lassitude générée par les récentes élections territoriales.
« Si vous sortez trop souvent de Yellowknife, vous manquez ce qui s’y déroule. Et bien entendu, si vous restez tout le temps à Yellowknife, vous passez à côté des communautés », résume Falvo.
Le jeu en vaut-il la chandelle?
L’ancien député du Nouveau Parti démocratique, Dennis Bevington, a pris part à six élections. Durant les différentes campagnes électorales, il lui est arrivé de dormir sur des porches ou à l’arrière de camions. Il est passé à deux doigts de se retrouver dans un fossé alors qu’il tentait d’éviter un troupeau de bisons sur l’autoroute en plein milieu de la nuit après un débat à Hay River, dans le sud du territoire. Il raconte avoir perdu environ cinq kilos lors de sa première campagne.
Ses dépenses ne se mesurent pas qu’en poids. Ses différents budgets allaient de 40 000 $ à 50 000 $. Cela comprenait tous les pamphlets, les affiches, la publicité et l’ouverture d’un bureau, ainsi que les nombreux billets d’avion.
Tout naturellement, les campagnes dans le Nord mobilisent aussi les bénévoles qui doivent préparer, autant que possible, le terrain pour les candidats. Les médias sociaux sont également utiles, a souligné, dans un courriel, Jennifer Phillips, la responsable de campagne du candidat conservateur Yanik D’Aigle.
L’avantage du sortant?
Avec des adversaires se déployant à travers les Territoires du Nord-Ouest, le titulaire sortant du siège fédéral, Michael McLeod semblerait avoir une longueur d’avance en termes de profil. Il voit cet avantage dans le fait que toute l’opération de séduction qui se joue pendant la campagne n’est que la continuité de son travail.
Puis, l’histoire rappelle un autre avantage. Avant que le député libéral ne batte Dennis Bevington lors de la fameuse marée rouge de 2015, seuls deux députés avaient représenté les T.N.-O. pendant les 27 années précédentes.
Malgré tout, les Territoires du Nord-Ouest ne sont pas faciles à prédire. En raison, sans doute, de l’absence d’un système de partis dans la politique territoriale, les électeurs ténois se soucient souvent plus de la personne qui se présente que de la couleur de la chemise qu’elle porte.