Aires protégées : Une approche différente dans les territoires
La Première Nation des Dénés Yellowknives a signé une entente fédérale qui finalise l’établissement de la réserve de parc national Thaidene Nene le 25 septembre 2020, un processus entamé il y a près de 40 ans. Au Yukon, la protection des aires protégées suit un parcours différent.
D’une superficie de 14 305 kilomètres carrés, la réserve Thaidene Nene devient le 47e parc national du Canada. Également partenaires, les Premières Nations de l’Akaitcho qui regroupent la Première Nation des Dénés de Lutsël K’e et la Première Nation Deninu K’ue, ont désormais « un rôle dans la gestion coopérative de la réserve », précise le député des Territoires du Nord-Ouest, Michael McLeod, par voie de communiqué de presse.
La création de cette réserve est le fruit d’un long processus de négociations entamées à la fin des années 1960 et est indissociable des revendications territoriales. À cette époque, le gouvernement du Canada propose la création d’un parc dans la région, mais l’idée ne génère que peu d’attention. C’est 20 ans plus tard que la proposition suscite de l’intérêt et refait surface dans le cadre des discussions lié à la revendication territoriale globale des Dénés et Métis. Cependant, aucune entente n’est trouvée.
Les traités signés au début des années 1900 ne sont pas compris de la même façon par le gouvernement fédéral et par les Premières Nations. « Les Dénés et la Couronne n’ont pas une compréhension commune des termes et travaillent à résoudre les problèmes de ressources et de gouvernance par la négociation », peut-on lire dans une brochure appelée Le processus Akaitcho, publiée par les Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada.
La réserve de Thaidene Nene fait donc aujourd’hui l’objet d’une gestion coopérative qui, selon le chef de la Première Nation des Dénés Yellowknives, Edward Sangris, « permet à nos membres de participer économiquement à la protection et à la cogestion du parc tout en respectant et en préservant nos droits issus des traités, notre histoire, notre culture et nos traditions ».
Symbole de « respect mutuel et de coopération » pour M. Sangris, la création de la réserve est l’occasion, pour le gouvernement fédéral, de réitérer son engagement de protéger un quart des terres et un quart des océans du Canada d’ici 2025 et pour lequel il a alloué un budget de 1,3 milliard de dollars en 2018.
Un scénario différent au Yukon
Dans le plus petit des trois territoires, le processus de création de la zone de protection de la rivière Tagish, à une centaine de kilomètres au sud-est de Whitehorse, est régit par l’accord-cadre définitif appelé Umbrella Final Agreement. Signé en 1993, cet accord politique est considéré comme un document de base pour toute discussion concernant le territoire, l’autodétermination ou encore les compensations financières.
D’une superficie de cinq kilomètres carrés, la zone en question recouvre la rivière Tagish ainsi que la partie sud du lac Marsh. Alors que des consultations avec les citoyens de la Première Nation ont eu lieu depuis les cinq dernières années, un projet de 33 recommandations sur la mise en œuvre d’une gestion pour la zone de la rivière Tagish doit être présenté au public en octobre afin de recueillir les commentaires.
« Nous avons fait un certain nombre de recommandations afin de nous assurer que le concept occidental ne sépare pas l’homme de la notion d’environnement, parce que dans notre savoir traditionnel, les hommes sont connectés aux rivières, aux montagnes et aux animaux qui ont une entité spirituelle », pense M. Wedge.
Dans une volonté de protéger les oiseaux migrateurs, comme les cygnes trompettes qui font habituellement halte dans la région, la neuvième recommandation insiste sur le fait d’informer le public, notamment sur les nuisances qui ont des effets majeurs sur la faune : « réduire ou éliminer la trafic des avions volant à basse altitude (y compris les drones) dans l’aire de protection de la rivière Tagish pendant les étapes clés de la vie des oiseaux migrateurs. Ceci peut être mis en place en réalisant du matériel éducatif à l’attention des exploitants d’aéronefs afin qu’ils évitent la zone à des moments précis de l’année. »
Cette recommandation, en particulier, exprime donc la nécessité d’établir un espace aérien contrôlé au-dessus de la rivière Tagish pendant la migration des oiseaux.
Désireux d’aller plus loin dans la démarche, la Premiere Nation de Carcross-Tagish a invité, il y a deux ans, des Maoris afin de discuter de leur approche dans la protection de leur environnement. Le 15 mars 2017, le parlement de la Nouvelle-Zélande a accordé le statut d’entité vivante à la rivière sacrée Whanganui.
Si les gouvernements du Yukon et du Canada ont accepté de discuter de cet aspect lors de futures rencontres, la Première Nation de Carcross-Tagish, espère, par ce biais, incorporer le savoir traditionnel et la cosmologie autochtone dans la législation contemporaine canadienne.