La fonte du pergélisol de l’Arctique pourrait libérer des virus inconnus

Dans les sols gelés de l’Arctique des virus sommeillent en attendant d’être libérés par le réchauffement climatique. (Mark Ralston/AFP/Getty Images)
Le réchauffement climatique qui dégèle le pergélisol de l’Arctique pourrait-il réveiller des virus ou des maladies oubliés potentiellement dangereux pour l’humanité ? C’est ce que redoutent deux chercheurs français après avoir mené des analyses dans les glaces de Sibérie en Russie.

Le couple Jean-Michel et Chantal Claverie tire la sonnette d’alarme. Les deux éminents spécialistes ont récemment fait la tournée des médias en Hexagone pour non seulement partager le fruit de leurs recherches, mais aussi leurs préoccupations.

Le pergélisol, aussi baptisé permafrost en anglais, est la partie du sol qui demeure gelé en permanence. Sa fonte accélérée serait « une bombe à retardement virale et bactérienne », a déclaré en entrevue au quotidien Le Parisien, Jean-Michel Claverie, ancien directeur du laboratoire Information génomique et structurale du CNRS.

Rappelons que le pergélisol arctique renfermerait 1500 milliards de tonnes de gaz à effet de serre, ce qui correspond à deux fois ce que contient l’atmosphère de notre planète. Plusieurs études du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) indiquent qu’il pourrait perdre jusqu’à 70 % de sa surface d’ici à 2100, une véritable catastrophe écologique pour le système climatique dont les répercussions sont encore trop mal connues.

Mais pour les deux chercheurs de l’Université Aix-Marseille, le phénomène pourrait aussi libérer des agents pathogènes endormis sous la glace depuis des dizaines voire des centaines de milliers d’années. Alors que l’humanité vit en ce moment une pandémie de nature globale due à la Covid-19, les signaux de Jean-Michel et Chantal Claverie sonnent comme un nouvel avertissement épidémiologique.

Les recherches ont montré que le pergélisol de l’Arctique libère plus de carbone en hiver que les plantes de la toundra ne peuvent en absorber en été. (Sean Kilpatrick/La Presse canadienne)
L’industrie minière dans la ligne de mire

Le duo de spécialistes en connaissent un bout sur les virus. En 2014, ils étaient parvenus à sortir d’un sommeil vieux de 30 000 ans, deux virus géants heureusement inoffensifs. « Il n’y a aucune raison pour que certains virus beaucoup plus embêtants pour l’Homme, les animaux ou les plantes ne survivent pas également plus de 30 000 ans », a toutefois indiqué Jean-Michel Claverie au micro de France Culture.

En 2016 en Sibérie, un enfant de 12 ans est décédé après avoir été contaminé par de l’anthrax présent dans des cadavres de rennes qui avaient été enterrés 70 ans auparavant. Une fonte partielle du sol gelé pourrait donc libérer d’anciens agents pathogènes potentiellement toujours infectieux tels la bactérie Bacillus anthracis ou la variole.

Les analyses des scientifiques ont révélé que des virus pouvaient résister de trente à cinquante mille ans dans le pergélisol. Quant aux bactéries, des études ont démontré qu’elles pourraient survivre jusqu’à deux millions d’années.

Mais le risque, selon les chercheurs, réside dans l’apparition de virus inconnus qui se trouveraient dans des couches encore plus profondes et par conséquent plus anciennes. À ce titre, Jean-Michel Claverie met en garde l’exploitation minière de plus en plus présente dans les zones arctiques. Cette ruée vers les ressources pourrait ouvrir une véritable boîte de Pandore, prévient-il.

Ismaël Houdassine, Regard sur l'Arctique

Ismaël Houdassine est diplômé en journalisme de l’Université de Montréal. Il commence sa carrière comme reporter et journaliste culturel. Avant de rejoindre l’équipe de Radio-Canada, il a collaboré durant plusieurs années pour plusieurs médias, notamment l’Agence QMI et Le HuffPost.

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