Un immense igloo au cœur d’un festival canadien valorisant l’art et la culture inuit
Chants de gorge, dance du tambour, théâtre : des performances artistiques et culturelles inuit sont présentées toute la fin de semaine dans un igloo d’environ 65 mètres carrés construit près d’Iqaluit à l’occasion du festival Qaggiq 2021.
« Une structure d’une telle envergure n’a jamais été construite auparavant [à Iqaluit] », assure le directeur général de l’organisme artistique à but non lucratif Qaggiavuut, Pitseolak Pfeifer, qui est derrière l’initiative.
Pendant six jours entiers, une équipe formée d’une douzaine de résidents d’Iqaluit s’est attelée à la tâche pour couper, déplacer et assembler quelque 1200 blocs de neige au parc Sylvia Grinnell.
Le résultat est à la hauteur des efforts consacrés : l’igloo d’environ 6 mètres de hauteur trône à l’entrée du parc.
En inuktitut, un igloo d’une telle envergure est appelé qaggiq. « Bien des Inuit n’ont même jamais été dans une structure comme celle-là », affirme Pitseolak Pfeifer.
« Une seule fois dans une vie »
Alex Flaherty, un résident d’Iqaluit qui est derrière la compagnie touristique Polar Outfitting, a contribué à la construction de ce qaggiq. Il n’avait encore jamais construit un igloo de cette taille.
« Les mots nous manquent pour décrire ce que nous ressentons et notre gratitude de contribuer à cette construction, dit-il. C’est une occasion qui ne se présente qu’une seule fois dans une vie. »
Traditionnellement, des familles inuit issues de différents campements avaient l’habitude de construire un qaggiq à l’arrivée du printemps pour célébrer leur culture et leur langue à travers des performances artistiques.
Des artistes d’un peu partout au territoire
Le festival Qaggiq 2021 est organisé par l’organisme Qaggiavuut, en partenariat avec la société Tukisigiarvik et le Festival des arts Alianait.
L’événement est ouvert à tous, mais la capacité maximale de l’igloo est limitée à 100 personnes en raison des règles de la santé publique. Samedi, les performances avaient lieu à l’extérieur pendant que les constructeurs de l’igloo s’empressaient de placer les derniers blocs de neige.
Des artistes des quatre coins du territoire sont sur place jusqu’à dimanche pour donner des performances.
Parmi les invités figure entre autres Sheena Akomalik, de la troupe de théâtre Tununiq, de Pond Inlet, venue présenter pour la toute première fois sa nouvelle pièce, Akia.
Le groupe de danse de tambour Huqqullaaqatigiit s’est aussi déplacé depuis Cambridge Bay pour présenter deux styles de chants du tambour.
Julia Ogina, l’une des membres du groupe, raconte qu’elle n’avait encore jamais performé dans un igloo. « C’est unique parce que [cette tradition] n’a pas été perpétuée pendant plusieurs générations », explique-t-elle. « Ça nous donne la chance de passer du temps tous ensemble. »
Ayant l’habitude de performer à l’intérieur, elle ajoute avoir dû confectionner de nouveaux vêtements traditionnels mieux adaptés aux températures hivernales. « Nous sommes plusieurs à avoir conçu de nouveaux ensembles tout spécialement pour cet événement », dit-elle.
Rêver grand
Le directeur général de Qaggiavuut explique que l’objectif de l’événement est aussi d’attirer l’attention sur l’absence d’infrastructures destinées aux arts de la scène au Nunavut.
« L’idée est venue d’un besoin d’obtenir une meilleure reconnaissance de la culture et de l’importance de construire un centre pour les arts de la scène », souligne Pitseolak Pfeifer.
Parmi les provinces et territoires au pays, Iqaluit est la seule capitale à ne pas disposer de bâtiments destinés spécifiquement aux arts de la scène.
Les artistes qui souhaitent s’illustrer devant un public doivent user de créativité, notamment en performant dans des gymnases d’écoles ou dans des bars.
L’organisme milite pour la construction d’un centre des arts de la scène depuis une dizaine d’années. En 2020, il a d’ailleurs mandaté deux entreprises de services-conseils pour effectuer une étude de faisabilité afin d’étudier la possibilité d’un tel projet.
Pitseolak Pfeifer explique que la crise sanitaire a ralenti le projet, mais que l’organisme recherche actuellement des sources de financement.