Des retards pourraient compromettre la surveillance des eaux arctiques canadiennes
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Les équipements nécessaires à la surveillance des eaux arctiques approchent la fin de leur durée de vie utile et des retards dans leur remplacement pourraient compromettre la capacité des organismes fédéraux à assurer la sécurité de cette région maritime, constate un nouveau rapport de la vérificatrice générale du Canada, Karen Hogan.
Cette dernière note que les satellites qui permettent de surveiller le trafic maritime dans cette région « ont déjà atteint la fin de leur durée de vie utile ou le seront bientôt, et ce, bien avant les dates de lancement prévues des satellites de remplacement ».
Lancés en 2019, les trois satellites de la constellation RADARSAT, qui fournissent des images radar aux organisations fédérales, sont déjà pleinement utilisés. Puisque ces satellites ont été conçus pour fonctionner sur une période de sept ans, une « dégradation progressive de leur performance » est attendue après 2026.
Or, le gouvernement fédéral reconnaît que l’élaboration d’un successeur à RADARSAT prendrait une autre décennie et « qu’il y a un risque important qu’une interruption des services d’observation de la Terre par satellites se produise après 2026 ».
Une faible marge de manoeuvre
Les brise-glace et des aéronefs vieillissants de la Garde côtière canadienne risquent également d’être mis au rancart avant qu’une nouvelle flotte entre en service.
La possibilité que des navires ne soient pas remplacés en temps opportun avait déjà été évoquée par la vérificatrice générale en 2021 dans un audit sur la Stratégie nationale de construction navale.
Lancée en 2010 par le gouvernement de Stephen Harper, la Stratégie nationale de construction navale vise l’achat d’une cinquantaine de navires pour la Défense nationale et la Garde côtière canadienne.
Si Karen Hogan jugeait qu’il y avait alors « peu de marge de manœuvre pour absorber de nouveaux retards », elle est maintenant d’avis que cette marge de manœuvre « a presque disparu ».
Ottawa prévoit remplacer les six brise-glace de la Garde côtière par une nouvelle flotte construite au chantier Davie, à Lévis. Or, les négociations permettant au constructeur lévisien d’être admissible aux contrats prévus dans le cadre de la Stratégie nationale de construction navale ne seront pas finalisées avant la fin de l’année.
La vérificatrice générale souligne qu’il aura fallu sept ans aux deux chantiers navals initialement inclus dans la stratégie nationale – Vancouver Shipyards à Vancouver et Irving Shipbuilding à Halifax – pour livrer leurs premiers navires.
Un délai similaire est anticipé pour la livraison du premier nouveau brise‑glace construit au chantier Davie (la livraison devrait avoir lieu en 2030). Or, « les brise-glace actuels devraient commencer à atteindre la fin de leur durée de vie utile en 2029 », constate Mme Hogan.
Cette dernière fait également état de retards dans la construction de navires de patrouille extracôtiers, plus petits que les traditionnels brise-glace. Selon elle, tout délai supplémentaire dans la livraison de ces navires augmente « les risques d’écarts dans la capacité de surveillance de l’Arctique ».
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Des répercussions sur la souveraineté canadienne
La vérificatrice générale souligne qu’en raison des changements climatiques, la couverture moyenne des glaces de mer dans l’Arctique canadien a rétréci de 40 % au cours des 50 dernières années. Parallèlement, le nombre de voyages dans les eaux arctiques canadiennes a plus que triplé au cours des trois dernières décennies, pour atteindre 464 voyages en 2019.
Ainsi, elle estime « probable que la circulation des navires dans les eaux arctiques continue à augmenter au cours des prochaines décennies » – rendant la région arctique plus vulnérable aux entrées non autorisées, à la pêche illégale et à la pollution marine.
C’est pourquoi elle appelle le gouvernement fédéral à agir pour « remettre le renouvellement de l’équipement sur une voie durable afin d’obtenir une vue d’ensemble de ce qui se passe dans l’Arctique ».
Dans un contexte d’intérêt renouvelé pour la région à des fins stratégiques et militaires, Mme Hogan est d’avis que « les décisions prises maintenant par le Canada en matière de surveillance des eaux arctiques pourraient avoir des répercussions durables sur sa souveraineté ».