Insectarium de Montréal : une Inuk découvre une nouvelle sous-espèce de papillon
C’est par un jour d’été sans nuages en 2019 que Siaja Parceaud-May a remarqué un papillon virescent (Colias tyche) qui présentait des « différences notables » par rapport à son apparence normale.
Elle était à environ une heure au nord de sa communauté natale de Kuujjuaq, au Nunavik, avec une équipe d’entomologistes et de chercheurs de l’Insectarium de Montréal qui lui apprenaient à identifier et à collecter des papillons.
Le long d’une crête sablonneuse et dégagée en direction de la baie d’Ungava, elle a repéré l’étrange créature qui serait envoyée à Montréal pour une analyse plus approfondie.
Son intuition s’est avérée juste. Plus d’un an plus tard, le directeur de l’Insectarium de Montréal, Maxim Larrivée, lui a écrit pour lui confirmer qu’elle a découvert une nouvelle sous-espèce de Colias tyche.
À sa grande surprise, cette sous-espèce a été nommée en son honneur : Colias tyche siaja.
« J’étais seule à la maison quand je l’ai appris, et j’ai sauté de joie. C’est un peu comme si un de mes rêves se réalisait », explique Siaja Parceaud-May.
Un programme scientifique communautaire
Sa découverte a été l’une des premières dans le cadre du programme Les sentinelles du Nunavik, un projet scientifique communautaire et un programme de formation avec l’Insectarium de Montréal qui offre aux jeunes Inuit et Cris de 12 à 30 ans des possibilités d’emploi et d’apprentissage en documentant le monde naturel qui les entoure.
Et après l’annulation des activités au cours des deux derniers étés en raison de la pandémie de COVID-19, la coordonnatrice du programme, Amélie Grégoire Taillefer, a hâte de reprendre le travail sur le terrain lorsqu’elle se rendra à Chisasibi, au Québec, ce mois-ci.
Mme Grégoire Taillefer explique que le programme lancé en 2019 apprend aux jeunes la surveillance, l’identification et la préservation des insectes et leur fait connaître l’écosystème du Nord, tout en dressant un inventaire indispensable des milliers d’espèces d’insectes de la région.
Selon Mme Grégoire Taillefer, des découvertes comme celle de Siaja Parceaud-May permettent aux scientifiques d’évaluer les conséquences des changements climatiques sur la faune des insectes et, aux côtés des communautés du Nunavik, de définir les mesures à prendre pour aider les communautés à se préparer aux « changements ».
Mme Parceaud-May, qui est âgée de 31 ans, aide maintenant à recruter d’autres jeunes dans le programme piloté par l’Insectarium. Elle note qu’il est facile de voir comment change l’environnement qui l’entoure.
Selon elle, c’est en partie pour cette raison qu’il est important de sensibiliser les jeunes à l’importance de l’écologie.
Sensibiliser les jeunes à l’école
À Chisasibi, Amélie Grégoire Taillefer formera certains de nouveaux collecteurs d’insectes et rencontrera les enseignants qui participent à ce programme, comme Krishna Rodriguez, qui enseigne à l’école primaire Waapinichikush.
Mme Rodriguez a découvert le programme Les sentinelles du Nunavik lorsqu’elle cherchait des activités scientifiques pour ses élèves, et elle a pensé que ce programme conviendrait bien à sa classe de sixième année.
« La COVID-19 les a vraiment affectés, parce que les enfants sont dans leur maison, ils ne sortent pas », estime Mme Rodriguez.
L’intérêt des élèves pour la recherche sur les insectes était limité au départ. Mais après qu’ils ont participé à certaines activités, mené leurs propres recherches et reçu des vidéos et des commentaires d’Amélie Grégoire Taillefer sur leurs découvertes, Mme Rodriguez dit avoir remarqué un changement dans l’attitude de ses élèves.
« Je laisse toujours mon téléphone cellulaire sur le bureau […] si j’allais aux toilettes, je revenais et je voyais des insectes sur mon téléphone », affirme-t-elle.
« C’est ce que je voulais leur inculquer, ce sens de la curiosité », conclut Mme Rodriguez.
D’après un texte de Rachel Watts de CBC