Abus sexuels dans le Grand Nord : la France étudie la requête du Canada pour l’extradition d’un prêtre

L’Inuk Piita Irniq (au centre) brandit une image du père Johannes Rivoire, qui a été accusé en 1998 d’avoir agressé sexuellement des enfants de Naujaat et de Rankin Inlet, mais qui réside désormais en France. (Justin Tang/La Presse canadienne)
Le ministère français des Affaires étrangères confirme avoir bel et bien reçu la demande d’extradition de Johannes Rivoire et indique aussi que la requête du Canada est « en cours de traitement par le ministère de la Justice » pour ce prêtre français accusé d’agressions sexuelles sur des enfants inuit il y a plus de 30 ans.

Bien qu’il soit très rare que l’Hexagone accepte d’extrader ses ressortissants, le Canada a néanmoins demandé l’extradition de cet oblat accusé d’agressions sexuelles et devenu pour beaucoup un symbole de l’impunité au sein de l’Église.

« Je suis au courant du fait qu’une demande d’extradition transmise à la France a été rendue publique, ce que les responsables de mon ministère viennent de confirmer », a indiqué le ministre fédéral dans un courriel transmis à l’AFP en refusant de donner plus de détails.

« Il est important pour le Canada et ses partenaires internationaux que les crimes graves fassent l’objet d’enquêtes et de poursuites exhaustives », a-t-il ajouté.

Cette annonce intervient juste après la fin du voyage du pape François au Canada, où il a demandé pardon pour les violences commises sur des enfants dans les pensionnats pour Autochtones.

Le père Johannes Rivoire, qui a passé trois décennies dans le Grand Nord canadien, fait l’objet d’un mandat d’arrêt au Canada depuis février, après le dépôt d’une nouvelle plainte en septembre pour une agression sexuelle survenue il y a environ 47 ans.

Il n’a pour l’instant jamais été inquiété et les autorités n’ont pas précisé le nombre total de ses victimes présumées.

M. Rivoire avait déjà fait l’objet d’un mandat d’arrêt entre 1998 et 2017 pour des agressions sexuelles sur trois mineurs, mais sans suite. Le prêtre a quitté le Canada en 1993 et vit désormais à Lyon.

Celui qui a la double nationalité représente un problème parce qu’il est « très compliqué » d’extrader des Français, a précisé à l’AFP une source proche du dossier.

Le nonagénaire, interrogé récemment par les médias, clame son innocence.

Dans le Nord canadien, son cas reste emblématique de l’impunité des agresseurs sexuels dans l’Église.

« Nous aimerions que Rivoire soit extradé au Canada pour faire face à ses accusations devant les tribunaux et nous avons demandé au pape d’intervenir pour lui demander de revenir au Canada », avait confié à l’AFP Kilikvak Kabloona, une représentante des Inuit du Nunavut, lors de la visite du pape.