Le réchauffement climatique pourrait provoquer un « débordement viral » depuis l’Arctique

Cette photo datant de mai 2017 montre des chercheurs perçant la glace pour recueillir des sédiments au fond du lac Hazen, au Nunavut, afin d’étudier comment les changements climatiques pourraient augmenter le risque de « débordement viral ». (Graham Colby/AFP via Getty)
Le réchauffement climatique pourrait provoquer un « débordement viral » depuis l’Arctique, si des virus jusqu’ici préservés dans la glace entraient en contact avec de nouveaux hôtes dans d’autres environnements, selon une étude publiée mercredi.

Les virus ont besoin d’un hôte (humain, animal, plante ou mousse) pour se répliquer et se diffuser, en utilisant au besoin un hôte dépourvu d’immunité, comme l’a montré la récente pandémie de COVID-19 avec l’humain.

Des scientifiques canadiens ont cherché à savoir si les changements climatiques favoriseraient un tel scénario dans l’environnement arctique du lac Hazen, à l’extrême nord du Canada. C’est le plus grand lac situé au-delà du cercle arctique.

Les chercheurs ont prélevé des échantillons du lit d’une rivière qui l’alimente à la fonte des glaces pendant l’été, ainsi que du fond du lac. Ce qui a nécessité de forer deux mètres de glace avant d’atteindre le fond, à presque 300 mètres.

Puis, une motoneige a ensuite hissé les sédiments avec des cordes. Ils ont été séquencés pour leur ADN et ARN, le code génétique et l’outil de réplication du vivant.

« Cela nous a permis de déterminer quels virus se trouvaient dans un environnement donné, et quels hôtes potentiels s’y trouvaient aussi », a expliqué à l’AFP Stéphane Aris-Brosou, professeur associé au Département de biologie de l’Université d’Ottawa, qui a supervisé l’étude.

L’équipe a ensuite cherché à savoir dans quelle mesure les virus étaient susceptibles de changer d’hôte, en examinant l’équivalent de leurs arbres généalogiques respectifs.

« Nous avons cherché à mesurer à quel point ces arbres (généalogiques) étaient similaires », a expliqué Audrée Lemieux, de l’Université de Montréal, première autrice de l’étude.

Des généalogies similaires suggèrent que le virus a évolué avec son hôte, alors que des différences indiquent qu’il a pu changer d’hôte. Et s’il l’a fait au moins une fois, il est susceptible de recommencer.

Les analyses ont montré de grandes différences dans les arbres généalogiques des virus et de leurs hôtes dans les sédiments extraits du fond du lac.

Ces différences étaient moins prononcées dans le lit de la rivière alimentant le lac. Les chercheurs supposent que l’eau de fonte des glaciers érode les sédiments du lit, limitant ainsi les interactions entre les virus et des hôtes potentiels.

En revanche, l’accélération de la fonte des glaciers alimentant le lac a aussi accru la quantité de sédiments qui y est transportée.

« Cela va mettre en contact des hôtes et des virus qui ne l’auraient pas été normalement », a dit Audrée Lemieux.

Les auteurs de l’étude, publiée dans la revue de recherches biologiques de la Royal Society, Proceedings B, ont pris soin de préciser qu’ils ne prévoient pas pour autant de débordement viral ni une pandémie.

« La probabilité d’événements dramatiques reste très faible », a précisé Mme Lemieux.

Selon les chercheurs, le risque s’accroîtrait avec la poursuite du réchauffement climatique, car de nouveaux hôtes pourraient s’aventurer dans des régions auparavant inhospitalières.

« Il pourrait s’agir aussi bien de tiques, ou de moustiques ou d’autres animaux, mais aussi des bactéries et des virus », a indiqué Mme Lemieux.

La possibilité d’un débordement est « complètement imprévisible, et ses conséquences aussi, allant d’un caractère bénin jusqu’à une vraie pandémie », a-t-elle conclu.

Un article de Sara Hussein, AFP

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