Visite au parc national Wapusk, l’un des moins accessibles au Canada
Avec ses 11 475 kilomètres carrés, le parc Wapusk, situé dans le nord du Manitoba près de la baie d’Hudson, est le huitième parc national au pays et le plus grand parc contenu dans une seule province. Pourtant, il est visité par seulement 150 personnes par année.
Le parc national a été créé, à l’origine, pour protéger les aires de mise bas des ours polaires et des caribous, en plus des loups gris qui les suivent.
Le parc comprend d’immenses étendues de zones humides qui servent d’habitat aux oiseaux aquatiques et d’anciennes crêtes de plage soulevées qui ont servi de chemins aux Dénés, aux Cris et aux Inuit pendant des millénaires.
Selon Russell Turner, scientifique spécialiste des écosystèmes à Parcs Canada, lorsque les touristes arrivent à Churchill, à 40 kilomètres du parc national Wapusk, ils entrent parfois dans le centre d’accueil de Parcs Canada pour demander quelle est la distance à parcourir jusqu’au parc ou s’ils peuvent rester dans le terrain de camping.
« On m’a déjà demandé : « Où est-ce qu’on entrepose les ours? » C’est une question amusante », relate-t-il.
Il raconte que les visages des touristes affichent tristesse et parfois confusion en apprenant que Wapusk leur est inaccessible pour des raisons de logistique et de sécurité.
« C’est très différent des parcs nationaux du sud. On ne peut pas se rendre dans le parc par ses propres moyens », explique Russell Turner. « Vous ne voulez pas camper dans la toundra et avoir un ours polaire dans votre camp, donc il n’y a pas de terrains de camping. »
Une des seules infrastructures dans le parc est le camp de recherche Nester One, qui est entouré d’une clôture empêchant les ours polaires d’y pénétrer et qui comprend des bâtiments pouvant accueillir une vingtaine de personnes.
Parmi les règles à suivre, toujours verrouiller la barrière métallique et ne jamais sortir sans fusil de chasse.
« C’est ma 412e nuit au camp, c’est ma deuxième maison », lance Ryan Brook, écologiste de la faune sauvage à l’Université de la Saskatchewan.
« C’est un véritable privilège de pouvoir venir à Wapusk, parce que très peu de gens se rendent sur le terrain. Des gens survolent la région en hélicoptère et prennent quelques photos d’un ours ou d’un caribou, mais nous sommes quelques chanceux à pouvoir y poser les pieds. »
Dans le secteur ouest du parc se trouve une ancienne base navale, à laquelle des touristes peuvent accéder. À cet endroit, le Wat’chee Lodge offre aux photographes animaliers la possibilité d’observer des ours polaires et leurs petits, pendant plusieurs semaines, à la fin du mois de février et au début du mois de mars.
Toutefois, le prix pour accéder au parc est élevé, même pour les scientifiques, selon Ryan Brook. « C’est incroyablement cher. Moi, un instructeur et 19 élèves sommes venus par hélicoptère et la facture va probablement dépasser les 10 000 $ », mentionne-t-il.
Un vaste écosystème
La majeure partie du parc est constituée de zones humides, qui vont des marais patrouillés par les busards cendrés aux grands étangs fréquentés par les cygnes siffleurs, les grues du Canada, les plongeons du Pacifique et les sternes arctiques.
Hormis quelques structures, les seuls signes de présence humaine dans le parc sont des restes de fusées venues d’un champ de tir aujourd’hui inactif à l’est de Churchill.
Les crêtes de plage, qui s’étendent du nord au sud, servent de voies de migration au troupeau de caribous du cap Churchill, qui compte entre 1000 et 3000 bêtes.
Des monticules herbeux sur certaines crêtes trahissent l’emplacement de tanières de renards arctiques.
Le parc est également le seul endroit du monde où l’on sait que les ours polaires, les grizzlis et les ours noirs se côtoient.
L’écologiste Ryan Brook estime que restreindre l’accès est un bon moyen de protéger le parc et la diversité écologique qu’il abrite.
« Je crois que l’accès au site par certains scientifiques et visiteurs est approprié et peut être fait de façon sécuritaire […] Nous pouvons le faire dans une certaine mesure, mais je crois qu’un écosystème si bien conservé vaut plus que tout l’argent du monde. »
Avec les informations de Bartley Kives