Plus de transparence réclamée pour de jeunes Nunavummiut placés en Alberta

Au Nunavut, 32,8 % de la population est âgée de moins de 15 ans, selon le recensement de 2021. (Photo : Radio-Canada/Matisse Harvey)

Des députés du Nunavut exhortent le gouvernement à rendre publiques les conclusions d’une enquête interne censée faire la lumière sur le placement de huit enfants nunavummiut dans des foyers sans permis en Alberta. Leur appel survient peu après la publication d’une décision du commissaire à l’information et à la protection de la vie privée du territoire, Graham Steele, qui préconise une plus grande transparence.

En mai 2023, le premier ministre P.J. Akeeagok a demandé la tenue d’une enquête interne sur le placement de huit enfants du Nunavut dans des foyers de groupes d’Airdrie, en Alberta, qui ne détenaient pas les permis nécessaires pour les accueillir. La province d’accueil n’avait, par ailleurs, pas été informée du placement avant l’arrivée des enfants, ce qui va à l’encontre des procédures établies.

À la fin de 2023, la firme d’Ottawa qui a mené l’enquête, Lamb & O’Brien, a remis son rapport final au ministère de l’Exécutif et des Affaires intergouvernementales (EAI), dont le premier ministre est responsable.

En vertu de la Loi sur l’accès à l’information, Radio-Canada a tenté d’obtenir ce rapport, mais n’a reçu qu’une copie presque entièrement caviardée.

Le rapport de l’enquête interne, obtenu par Radio-Canada en vertu de la Loi sur l’accès à l’information, a presque été entièrement caviardé par le ministère de l’Exécutif et des Affaires intergouvernementales. (Photo : Radio-Canada/Matisse Harvey)

Hypervigilance nécessaire, selon la représentante de l’enfance et de la jeunesse

Dans une déclaration écrite, l’attachée de presse du premier ministre a fait savoir le mois dernier que le rapport demeurerait en interne.

La représentante de l’enfance et de la jeunesse, Jane Bates, affirme que le gouvernement ne l’a pas informée, en décembre, que le rapport d’enquête était achevé.

Pourtant, dans son tout nouveau cadre stratégique quinquennal (en anglais), présenté le 23 février à l’Assemblée législative, le ministère des Services à la famille s’est engagé à faire preuve de transparence à l’égard des « changements nécessaires » pour mener à bien son mandat.

La question de la transparence figure d’ailleurs parmi les multiples lacunes soulevées par la vérificatrice générale du Canada dans un rapport alarmant portant sur les services de protection de l’enfance du territoire, paru en mai dernier.

Pour Jane Bates, les placements hors territoire requièrent un degré accru de vigilance de la part de toutes les parties concernées. « Il est absolument impératif de mettre en place des mécanismes de contrôle et d’équilibre. Plus on s’éloigne de sa famille et de sa communauté, plus on est à risque […]. Je suis sûre que la plupart des établissements sont sûrs et qu’il n’y a pas de problèmes, mais il faut être hyper vigilant », affirme-t-elle.

Ces enfants et ces jeunes, qui ont des besoins complexes, sont placés dans des environnements et avec des personnes qu’ils ne connaissent pas, loin de leur famille, de leur culture et de leur communauté, rappelle-t-elle.

Le gouvernement territorial devrait divulguer le rapport », dit le commissaire

Le commissaire à l’information et à la protection de la vie privée du territoire, Graham Steele, a révisé la manière dont le ministère a traité la demande d’accès à l’information faite par Radio-Canada.

Dans sa décision rendue jeudi (en anglais), il juge que le gouvernement se devait de caviarder toute information permettant d’identifier les enfants et que les exceptions prévues par la loi avaient été, en majeure partie, respectées.

Il conclut toutefois que, compte tenu des circonstances de l’affaire, EAI devrait « exercer son pouvoir discrétionnaire en faveur de la divulgation du rapport d’enquête », tout en maintenant la confidentialité des informations qui compromettent le droit à la vie privée des enfants.

« Ma décision peut être résumée simplement : EAI n’est pas tenu de divulguer le rapport d’enquête, mais il devrait le faire », dit Graham Steele.

Le ministère de l’Exécutif et des Affaires intergouvernementales a reçu au mois de décembre le rapport de l’enquête interne menée par la firme Lamb & O’Brien. (Photo : Radio-Canada/Matisse Harvey)

Le gouvernement doit agir, martèlent des députés

Le député territorial de la circonscription Iqaluit-Tasiluk, George Hickes, croit que le gouvernement du Nunavut doit passer de la parole aux actes. « C’est une occasion parfaite [pour le gouvernement] d’être ouvert et transparent », soutient-il.

« Si nous n’avons pas accès à ces recommandations, comment pouvons-nous nous assurer qu’elles sont même suivies? », s’interroge le député.

Les députés siègent actuellement à l’Assemblée législative pour la session d’hiver, qui se poursuit jusqu’au 14 mars.

Jeudi, la députée territoriale d’Iqaluit-Sinaa, Janet Pitsiulaaq Brewster, a apostrophé la ministre des Services à la famille à plusieurs reprises au sujet de l’enquête interne.

« Il est vraiment important que quelqu’un tienne [le ministère] des Services à la famille responsable des recommandations qui sont issues de cette enquête interne », soutient la députée, en entrevue avec Radio-Canada.

Janet Pitsiulaaq Brewster se dit préoccupée par le fait que le bureau de la représentante de l’enfance et de la jeunesse ne peut pas accéder au rapport « parce que, non seulement il y a un manque de transparence, mais il y a aussi la préoccupation très réelle que le gouvernement ne suive pas les recommandations ».

Le ministère de l’Exécutif et des Affaires intergouvernementales n’a pas répondu à la demande de commentaires de Radio-Canada avant l’échéance. Dans un échange de courriels, jeudi après-midi, l’attachée de presse du premier ministre a déclaré que celui-ci avait besoin de plus de temps pour étudier les recommandations du commissaire à l’information et à la protection de la vie privée.

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