La Cour d’appel du Nunavut autorise la poursuite sur l’enseignement de la langue inuit

Le Centre de justice du Nunavut, à Iqaluit. La Cour d’appel du Nunavut a rejeté l’appel du gouvernement territorial dans la poursuite sur l’enseignement de l’inuktut.
(Radio-Canada/Matisse Harvey)

L’appel déposé par le gouvernement du Nunavut pour mettre fin à une poursuite judiciaire affirmant que le territoire n’en fait pas assez pour offrir des programmes scolaires en langue inuit a été rejeté par la Cour d’appel du Nunavut.

C’est la deuxième fois qu’une cour du territoire rejette un appel du gouvernement du Nunavut dans cette affaire. La Cour du Nunavut avait aussi débouté le gouvernement territorial en mars 2023.

Déposée en 2021, la poursuite alléguant que les étudiants inuit sont victimes de discrimination en ne recevant pas une éducation en inuktut pourra donc aller de l’avant.

L’organisme à l’origine de la poursuite, Nunavut Tunngavik Incorporated (NTI), a réagi à la nouvelle par communiqué.

« Quand les élèves reçoivent une éducation dans leur propre langue et culture, ils font face à moins de barrières sur le plan pédagogique et profitent de davantage de possibilités pour atteindre leurs buts, de la remise de diplômes à l’entrée sur le marché du travail », indique l’organisme inuit.

« NTI affirme dans sa poursuite que le traitement discriminatoire de l’inuktut par le [gouvernement du Nunavut] dans les écoles du Nunavut, en comparaison avec l’anglais et le français, a érodé [la langue] et fait diminuer le taux de réussite scolaire et de diplomation des élèves inuit. »

La présidente de NTI, Aluki Kotierk, et la ministre de l’Éducation du Nunavut, Pamela Gross, n’ont pas répondu à des demandes d’entrevue.

Bernice Kuutuu Clarke et sa fille Alethea. Bernice est retournée à l’école pour apprendre à enseigner l’inuktitut afin de pouvoir l’enseigner à son tour à sa fille.
(Kieran Oudshoorn/CBC)

Le risque de perdre son identité

De son côté, Bernice Kuutuu Clarke, l’une des deux plaignantes à l’origine de la poursuite avec NTI, n’a pu retenir son émotion en recevant la nouvelle. « Je me suis mise à pleurer », dit-elle.

Mme Clarke estime que la transmission de la langue aux plus jeunes est importante.

« Mes trois premiers enfants ne parlent pas l’inuktitut et c’est courant », raconte-t-elle. « J’ai voulu changer ça en l’enseignant à ma fille avec l’aide de mon mari, qui m’encourage à transmettre la langue à notre fille. »

Selon Bernice Kuutuu Clarke, ce n’est pas que dans les écoles du Nunavut que l’inuktut se fait rare.

« Il n’y a pas d’inuktitut quand on va au bureau de poste. Il n’y a pas d’inuktitut dans les événements à Iqaluit. Il n’y a pas d’inuktitut pour permettre à ma fille de continuer à devenir bilingue », explique-t-elle.

« J’ai donc besoin de l’aide de toute la communauté pour que ma fille puisse devenir bilingue à l’école, au magasin, en jouant avec ses amis et [en interagissant] avec ceux qui viennent me rendre visite », ajoute-t-elle.

Selon les données de 2021 de Statistique Canada, environ 53 % de la population du Nunavut a comme langue maternelle l’inuktut, comparativement à 65 % en 2016 et 72 % en 2001.

Le pire scénario de l’absence de l’inuktut dans les écoles et la vie de tous les jours, selon Mme Clarke, est la perte d’identité.

« C’est la chose la plus triste pouvant arriver à quelqu’un. La langue est porteuse de souvenirs pour moi. Le souvenir que j’ai de mes grands-parents est en inuktitut », dit-elle.

Avec les informations de TJ Dhir

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