Alors que l’OMS vient de déclarer une urgence sanitaire mondiale concernant le coronavirus, au Canada, des voix commencent à s’élever tant dans les milieux politiques qu’au sein du public pour critiquer ce qui est perçu comme étant une certaine mollesse dans la réponse à la crise de santé publique qui semble se dessiner.
Yves-François Blanchet, chef du Bloc québécois PHOTO : RADIO-CANADA
Pour le moment, seuls trois Canadiens sont infectés par le coronavirus et une vingtaine sont sous surveillance médicale préventive. Le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, déclare toutefois que le gouvernement ne peut pas attendre que la situation s’améliore.
« Je n’ai pas l’impression, lorsque je regarde les nouvelles, que nous avons le contrôle total de la situation, dit-il. Et comme il s’agit de tout sauf d’une question politique, je pense qu’il n’y a aucune raison de ne pas divulguer pleinement ce qui serait un plan pertinent et complet pour anticiper les risques éventuels. »
Le député néo-démocrate Don Davies accuse pour sa part le gouvernement libéral de laisser-faire. Il affirme que la réaction du gouvernement n’a pas suivi le rythme de l’urgence de la crise du coronavirus et que cela met maintenant en danger tous les Canadiens.
Que va-t-on faire avec les Canadiens revenant de Chine?
Le néo-démocrate Don Davies est le député fédéral de Vancouver Kingsway.
PHOTO : LA PRESSE CANADIENNE / ADRIAN WYLD
Don Davies affirme par exemple que les Canadiens qui reviendront de Chine prochainement sur un vol spécial affrété par le gouvernement canadien devraient être mis en quarantaine pour protéger la santé publique.
La ministre de la Santé Patty Hajdu a déclaré jeudi qu’aucun des 196 Canadiens qui ont demandé de l’aide pour rentrer chez eux ne sera autorisé à monter à bord de l’avion si elles sont malades. Mais elle n’a pas voulu dire si les Canadiens qui ne présentent aucun symptôme devront être mis en quarantaine à leur arrivée au pays.
Jeudi, le premier ministre Justin Trudeau n’a pas voulu non plus révéler le détail des protocoles qui seraient requis pour ces Canadiens revenant de la région touchée, comme la quarantaine ou l’auto-isolement.
Un passager malade témoigne du laisser-faire, à ses yeux, des responsables aéroportuaires
Des passagers portent des masques à l’aéroport international Pearson de Toronto le dimanche 26 janvier 2019. (Evan Mitsui/CBC)
À son arrivée à Toronto en provenance de l’Asie, un passager dont le nez coulait abondamment s’interrogeait jeudi sur l’efficacité réelle des mesures de dépistage du coronavirus dans les aéroports canadiens.
Massie Beveridge, un chirurgien général à la retraite, déclare avoir signalé ses symptômes à un agent des services frontaliers qui s’est borné à lui tendre une brochure, en lui disant qu’il pouvait appeler la santé publique s’il en éprouvait le besoin.
L’ homme qui a développé un vilain rhume avec une toux et un écoulement nasal lors de son vol entre Hong Kong et Toronto se demande s’il existe des garanties adéquates pour empêcher la propagation du nouveau coronavirus au Canada. « Mon nez coule comme les chutes du Niagara, je tousse et je me sens assez malheureux », a déclaré l’ex-chirurgien à CBC News.
« Donc, quand je suis arrivé devant l’agent d’immigration, je lui ai expliqué cela et il m’a emmené dans une petite zone sécurisée où il y avait une table, des masques, des produits pour se laver les mains et il m’a demandé de m’asseoir là. »
« Je me suis dit qu’un agent de santé publique viendrait m’interroger. En fait, il n’y en avait pas, et l’agent d’immigration est revenu quelques minutes plus tard en disant : « Voici un document. Vous pouvez appeler la santé publique si vous voulez. » Et il m’a fait signe de passer. »
Personne n’a même pris sa température. « J’aurais pu passer par là en reniflant et en éternuant et ne rien dire et personne n’aurait été plus sage », a-t-il conclu.
La grande responsable de la santé publique au Canada se fait rassurante
L’administrateur en chef de la santé publique du Canada, la Dre Theresa Tam. (Justin Tang/La Presse canadienne)
L’administrateur en chef de la santé publique du Canada, la Dre Theresa Tam, affirme que des mesures de contrôle renforcées sont en place, mais qu’il est probable que l’ex-chirurgien n’a pas été contrôlé avec ces mesures parce qu’il n’a été à Hong Kong que brièvement et qu’il n’a pas été en Chine ou dans l’une des zones touchées.
« Pour le coronavirus, les mesures renforcées aux frontières, en plus de ce que nous avons comme base, consistent essentiellement à fournir les informations sur l’écran et les questions des kiosques et à orienter les personnes vers les agents des services frontaliers canadiens. »
« Le dépistage à l’entrée n’est qu’une couche d’une stratégie à plusieurs niveaux… Il n’est jamais suffisant, et il est vraiment important de s’assurer que notre système de soins de santé est alerté afin de diagnostiquer et de gérer les cas. C’est donc ainsi que le système fonctionne actuellement », a-t-elle ajouté.
La Dre Tam conclut que toute personne malade devrait le déclarer aux agents des services frontaliers.
Des inquiétudes planent sur les mesures de contrôles aéroportuaires
Frank Scarpitti, le maire de Markham, demande au gouvernement fédéral de mettre en place un contrôle renforcé dans tous les aéroports. (CBC)
Frank Scarpitti, le maire de la municipalité de Markham, à 30 kilomètres au nord-est de Toronto, déclare que s’il a une grande confiance dans les responsables de la santé publique aux niveaux fédéral, provincial et local, il continue à faire pression sur Ottawa pour qu’il mette en place un contrôle plus poussé dans tous les aéroports du pays.
« Je pense que cela donnerait aux Canadiens un sentiment de confiance plus grand si cette mesure supplémentaire est prise », a dit M. Scarpitti à CBC News.
« Cela ne permettra pas d’attraper tout le monde, mais ce n’est qu’une autre couche de contrôle, au lieu d’un simple contrôle volontaire, et d’indiquer où une personne a pu voyager. »
M. Scarpitti a également évoqué les mesures d’autres grands aéroports de New York, San Francisco et Los Angeles, qui prévoient le dépistage des symptômes chez les passagers en provenance de Chine. « Il suffit de regarder au sud de la frontière, les aéroports américains ont institué cela », a-t-il précisé.
Le Canada doit-il en faire plus?
La ministre de la Santé Patty Hajdu (CBC)
Dans le contexte de l’OMS qui vient de déclarer une urgence sanitaire mondiale, la ministre de la Santé Patty Hajdu déclare que le Canada suit déjà les recommandations de l’organisme de l’ONU.
Elle ne voit donc pas la déclaration de jeudi comme une raison de modifier la réponse nationale.
« Le risque reste faible. Il est évident qu’il est faible parce que les voyages à destination et en provenance de la région touchée deviennent plus difficiles. Et bien sûr, nous avons un système très sophistiqué ici au Canada », a-t-elle déclaré.
La déclaration de l’OMS pourrait signifier cependant que le Canada pourrait être appelé à fournir davantage de soutien aux pays qui ne disposent pas de systèmes de santé avancés, a-t-elle ajouté.
RCI avec les informations de CBC News, et la contribution de Radio-Canada
CORONAVIRUS DE WUHAN – NOTRE COUVERTURE COMPLÈTE
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