Le nouveau Guide alimentaire canadien traduit en langues autochtones

Le Guide alimentaire canadien a été traduit en plusieurs langues autochtones, incluant l’inuktitut de l’île de Baffin, du Nunavik, du Nunatsiavut, l’inuinnaqtun et le déné. (Martin Thiabult/Radio-Canada)
Dans le cadre d’une démarche double combinant la préservation des langues autochtones et la promotion de saines habitudes alimentaires, Santé Canada a lancé mardi la publication du nouveau Guide alimentaire canadien en plusieurs langues autochtones.

Ces langues, le cri des plaines, le déné, l’inuinnaqtun, l’inuktitut de l’île de Baffin, l’inuktitut du Nunatsiavut, l’inuktitut du Nunavik, le michif, l’ojibwé et l’oji-cri, sont les plus couramment parlées par les Autochtones au pays, mentionne le ministère par voie de communiqué.

On y compte également les langues officielles du gouvernement du Nunavut, « ainsi que des dialectes recommandés par les représentants nationaux de peuples et de nations autochtones », précise-t-on.

Toujours selon le gouvernement fédéral, il s’agit là d’une démarche visant l’inclusion des 1,6 million d’Autochtones au sein de la population canadienne.

« En 2019, Année internationale des langues autochtones, je suis heureux d’appuyer le lancement du Guide alimentaire canadien en bref en neuf langues autochtones. Nous contribuons ainsi à l’offre d’outils de saine alimentation aux Autochtones tout en reconnaissant l’importance de la langue et de la culture pour la santé globale », a déclaré Seamus O’Regan, ministre des Services aux Autochtones.

À Santé Canada, le Dr Alfred Aziz, directeur général du Bureau de la politique et de la promotion de la nutrition, précise que le ministère a « tenu compte des traditions et des facteurs qui touchent à l’alimentation chez les peuples autochtones, en plus de reconnaître l’importance des aliments traditionnels ».

« Nous reconnaissons que de nombreux Canadiens ont de la difficulté à assurer leur bonne alimentation; il est essentiel de comprendre les obstacles qui empêchent les individus de faire des choix alimentaires sains. »

Santé Canada travaille d’ailleurs sur des « outils », en collaboration avec Services aux Autochtones Canada, pour favoriser une alimentation simple chez les premiers peuples. L’élaboration des outils en question n’en est toutefois qu’aux premières étapes.

L’alimentation, un enjeu essentiel

Rejoindre davantage de communautés, c’est bien beau, mais encore faut-il que les communautés en question puissent avoir accès aux aliments sains, rappelle la nutritionniste Mélanie Napartuk.

« [Avec cette traduction], on a l’impression que les premiers peuples sont moins inaperçus que jadis; ce n’est plus une bataille pour se faire voir », indique-t-elle au bout du fil, en ajoutant que cette annonce de Santé Canada facilitera le travail de plusieurs nutritionnistes.

Mais était-il vraiment essentiel de consacrer du temps et des ressources à cette traduction? « Quarante pour cent des enfants des Premières Nations vivent dans l’insécurité alimentaire », indique Mme Napartuk, qui se demande si les efforts linguistiques de Santé Canada ne sont pas « déconnectés de la réalité ».

« Quand on a faim, savoir que bien manger est lié à une meilleure santé [n’aide pas beaucoup]. »

Mélanie Napartuk, nutritionniste

Comment résoudre l’épineux problème de cette insécurité alimentaire? « C’est un problème tellement multifactoriel, [nous avons] besoin de solutions multifactorielles », soutient encore Mme Napartuk.

Selon cette dernière, la transition alimentaire a été particulièrement rapide entre les aliments traditionnels et la nourriture ultratransformée contemporaine, ce qui a entraîné quantité de problèmes. Il serait donc nécessaire de se concentrer sur l’éducation et l’apprentissage pour transformer les moeurs en matière d’alimentation, indique la nutritionniste.

Sans oublier, non plus, les impacts environnementaux qui peuvent parfois rendre la faune traditionnelle impropre à la consommation.

Des peuples éprouvés

Les problèmes liés au changement de l’alimentation et du mode de vie chez les Premières Nations sont effectivement légion. La sédentarité et l’apparition de la malbouffe ont contribué à des statistiques pour le moins inquiétantes : environ 61 % des membres des Premières Nations souffrent de maladies chroniques, contre une proportion de 53 % au sein de la population canadienne en général.

Les membres des Premières Nations sont également proportionnellement plus nombreux à souffrir de diabète (17 %) et d’obésité (26 %) que les Canadiens dans leur ensemble. Au pays, 5 % de la population est atteinte de diabète, et 16 % souffre d’obésité.

Au Québec, le tiers des ménages des Premières Nations vit dans l’insécurité alimentaire, entre autres en raison, bien souvent, de la pauvreté de l’offre en magasin et des prix élevés.

Le coût hebdomadaire moyen de l’épicerie pour une famille de quatre personnes chez les Premières Nations interrogées se situe en effet à 262 $, et peut aller jusqu’à 336 $ dans certaines communautés. Comparativement, le coût d’une même épicerie à Montréal se situe à 196 $. Cette situation pousse certains ménages à consommer des aliments plus riches en gras ou en sel.

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