Relations avec la Russie dans l’Arctique : pas de retour en arrière, dit un rapport finlandais

Un garde-frontière finlandais surveille un secteur près de la frontière russe en Laponie, à l’automne 2021. (Gardes-frontières finlandais RAJA)
Une « nouvelle guerre froide » s’est installée dans les relations entre la Russie et les autres pays circumpolaires. La Finlande doit ainsi redéfinir sa stratégie arctique selon de nouveaux axes, d’après un rapport commandé par le bureau du premier ministre finlandais.

L’avenir des échanges et de la coopération entre la Russie et les autres pays de l’Arctique demeure flou, mais une chose est sûre : « il n’y aura pas de retour à la réalité d’avant-guerre », écrit-on d’emblée.

Le document souligne la nécessité de conserver des canaux de communication et de travailler sur certains chantiers communs avec les Russes, car les pays sont voisins et feront toujours partie de l’Arctique. La moitié de l’espace arctique est en territoire russe, rappellent les auteurs du rapport de 85 pages, publié cette semaine, dont un résumé de 7 pages a été produit en anglais.

La Finlande, qui a une frontière longue de 1340 km avec la Russie, doit collaborer sur des enjeux pratiques sans jamais mettre en péril sa sécurité et en ne créant pas de liens de dépendance qui pourraient être nuisibles à long terme, mentionne le document. Il est signé par des chercheurs du Centre sur l’Arctique de l’Université de Laponie, en collaboration avec la firme Gaia Consulting Oy et l’Institut finlandais des affaires internationales.

Même si la confiance mutuelle est brisée, la Russie est toujours signataire d’accords internationaux contraignants, tels le traité sur l’interdiction de la pêche commerciale dans le Haut-Arctique ou l’Accord de Paris sur le climat, mentionne le document, ce qui demande une collaboration minimale au niveau international.

Des éoliennes en activité dans le nord de la Finlande (iStock)
Changements climatiques et transition verte

Le document insiste sur la nécessité de continuer les travaux et de faire avancer des dossiers au sein du Conseil de l’Arctique, même s’il a été essentiellement mis sur pause depuis que les pays occidentaux ont sanctionné la Russie à la suite de l’invasion de l’Ukraine.

« Dans ce forum, la Finlande a la chance de jouer un rôle significatif et d’avoir une voix forte sur de nombreuses questions importantes, telles que la protection de l’environnement et du climat, le développement durable et la préparation aux situations d’urgence », est-il écrit.

Toutefois, « la paralysie de la coopération internationale et de la recherche dans la région arctique est particulièrement problématique. De nombreuses mesures liées à la durabilité de l’Arctique nécessitent une vaste coopération internationale et régionale, car la nature et l’environnement ne s’arrêtent pas aux frontières nationales ». Aussi, la suspension de la coopération en matière de recherche avec la Russie crée des trous dans les connaissances sur le réchauffement climatique dans l’Arctique, déplorent les auteurs.

Cet état de fait depuis la guerre contre l’Ukraine est problématique aussi pour la transition énergétique et le remplacement progressif des énergies fossiles. La Finlande doit redoubler d’efforts avec ses alliés et ce n’est pas qu’une question environnementale : il y a aussi ici des enjeux de souveraineté énergétique et de sécurité nationale, rappelle-t-on.

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Des rennes en Laponie, dans le nord de la Finlande (iStock)
Les forums des peuples autochtones

Les organisations représentant les peuples autochtones dans l’Arctique, au premier chef les Samis de Finlande et de Russie, pâtissent également des incertitudes engendrées par la guerre. 

« Il y a maintenant un gouffre majeur dans les activités des peuples autochtones parce que la direction de l’organisation russe des peuples autochtones de l’Arctique [RAIPON] soutient la guerre et, de plus, il y a des Samis, des Inuit et des Aléoutes dans le Conseil de l’Arctique qui vivent également sur le territoire russe », souligne le document. Si le Conseil de l’Arctique venait à cesser d’exister, il serait nécessaire de trouver une autre façon d’exercer cette coopération et de maintenir le maximum d’activités, ajoute-t-on.

La Finlande doit aussi s’interroger sur l’avenir d’un forum régional comme la Coopération de Barents, qui regroupe les pays nordiques et la Commission européenne, mais dont la Russie a été exclue depuis l’invasion de l’Ukraine. Peut-être faudrait-il revoir les mécanismes de coopération dans le nord de l’Europe, particulièrement entre les pays nordiques, est-il avancé.

Des soldats finlandais marchent près d’un tank dans le cadre de l’exercice Cold Response de l’OTAN, qui s’est tenu dans le nord de la Norvège en mars 2022. (Yves Herman/Reuters)
La sécurité dans l’Arctique

Finalement, la décision de la Finlande de se joindre à l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), en même temps que la Suède, augmente substantiellement les besoins en recherche sur la sécurité dans l’Arctique. « En tant que membre probable de l’OTAN, il est dans l’intérêt de la Finlande de développer une stratégie arctique pour l’OTAN », poursuit le rapport.

La Finlande doit aussi faire valoir l’importance des enjeux touchant l’Arctique auprès des instances de l’Union européenne, qui peut prendre le relais de forums comme le Conseil de l’Arctique qui sont désormais moins opérants.

« L’Union européenne est un outil essentiel pour les objectifs arctiques de la Finlande. L’UE dispose de programmes, de réseaux et de financements pour la coopération et les activités transfrontalières dans de nombreux domaines […] Les programmes de l’UE peuvent canaliser le soutien vers les régions frontalières touchées par l’effondrement de la coopération » entre la Russie et les pays occidentaux, soutient-on.

En résumé, la politique sur l’Arctique de la Finlande doit demeurer souple, selon les auteurs du rapport, car la Russie est imprévisible et une décision surprise peut survenir à tout moment, ce qui commande une réponse agile et rapide.

« La Finlande doit être en mesure de maintenir une compréhension des régions arctiques de la Russie dans de nouvelles circonstances. Des informations à jour sont particulièrement importantes pour assurer la résilience climatique et le développement durable dans l’Arctique. »

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