Nord-ouest du Canada : près de 85 % du bassin versant de la rivière Peel protégé

La signature du plan final d’aménagement du bassin de la rivière Peel est qualifiée de moment historique qui met un terme à 15 ans de consultations publiques et de recours judiciaires. (Steve Silva/Radio-Canada)
Le gouvernement du Yukon et les chefs des Premières Nations yukonnaises de Na-Cho Nyäk Dun, Tr’ondëk Hwëch’in et Vuntut Gwitchin, auxquelles s’ajoute le Conseil de bande des Gwich’in, des Territoires du Nord-Ouest, ont signé jeudi à Mayo le plan final d’aménagement qui prévoit une protection de 83 % des 67 431 km2 du bassin versant de la rivière Peel, dans le nord-ouest du Canada.

« C’est un grand jour », s’est exclamé Simon Mervyn, le chef de la Première Nation de Na-Cho Nyäk Dun, celle qui est la plus près de la région visée par le plan. « L’une des routes les plus difficiles qu’a eu à naviguer [la Nation] Na-Cho Nyäk Dun. »

Les dignitaires ont été invités à verser de l’eau puisée dans les affluents de la rivière Peel et dans le fleuve Yukon pour accompagner chacun de leur discours et chacune de leur signature.

La ministre fédérale de l’Environnement et du Changement climatique, Catherine McKenna, était aussi présente.

La ministre fédérale de l’Environnement et du Changement climatique, Catherine McKenna (gauche), a affirmé lors de la signature du plan final d’aménagement du bassin de la rivière Peel que cet événement représentait bien ce qu’est le processus de réconciliation auprès des peuples autochtones. (Steve Silva/Radio-Canada)

Pour le premier ministre du Yukon, Sandy Silver, la rivière Peel est un joyau à protéger.

« C’est un grand jour pour le pays en entier. La rivière Peel est l’une des plus grandes rivières intactes au monde et l’une des régions les plus vierges qui existent encore. »

Sandy Silver, premier ministre du Yukon

« Ce n’est pas la fin du voyage, mais plutôt un tournant important […] et nous empruntons maintenant le chemin du bon pied », a ajouté le premier ministre avec émotion.

Roberta Joseph, chef de la Première Nation de Tr’ondëk Hwëch’in, à Dawson, s’exprime lors de la signature du plan final d’aménagement du bassin versant de la rivière Peel avant d’apposer sa signature aux documents. (Steve Silva/Radio-Canada)

Roberta Joseph, la chef de la Première Nation de Tr’ondëk Hwëch’in, à Dawson, a affirmé son soulagement : « Cette journée a mis du temps à venir. Nous ne croyions jamais qu’il nous faudrait 15 ans pour atteindre cet objectif […] Un aîné a dit : “Nous sommes un peuple résilient.” Et je suis d’accord. »

Différentes zones de gestion

Le nouveau plan permettra le développement industriel sur 17 % du territoire, en fonction d’un processus d’évaluation environnementale et socio-économique.

L’autre portion, représentant 83 % du territoire protégé, sera répartie en trois catégories de terres :

  • 55 % formeront une zone de gestion spéciale, où aucun droit minier ou pétrolier ne sera octroyé;

  • 25 % constitueront une zone sauvage, où aucun droit minier ou pétrolier ne sera octroyé pendant une certaine période dont la durée sera revue dans un processus établi par un comité rassemblant toutes les parties;

  • 3 % seront consacrés à la protection du caribou boréal.

Le plan compte par ailleurs 42 recommandations, dont l’imposition de limites à l’utilisation de véhicules tout terrain, l’interdiction de construire des infrastructures le long des rivières et le développement d’un corridor de gestion près de la route Dempster.

Le bassin hydrographique de la rivière Peel représente 14 % du territoire du Yukon. (Radio-Canada)

« J’ai envie de penser que mon rôle de chef s’est terminé en sachant que nos enfants pourront profiter de ce territoire. Mais en fait, le travail ne fait que commencer », a ajouté le chef Simon Mervyn, rappelant du même souffle la nécessité de réaliser de nombreuses études sur la faune et la flore.

La signature officielle, jeudi après-midi, met ainsi fin à 15 ans de travaux et de consultations marqués par un recours judiciaire.

Un vaste territoire au coeur d’un long litige

Au coeur du vecteur politique devenu un emblème des relations entre le territoire et les Premières Nations s’étendent 68 000 kilomètres carrés de nature sauvage prisés des amateurs de plein air et dans la ligne de mire des intérêts miniers.

Pour David Loeks, président de la Commission d’aménagement du territoire pendant plus de cinq ans, cette signature est un soulagement.

« Je suis enchanté de voir la manière dont tout s’est réglé. C’est formidable le de voir les intérêts des Yukonnais et des Premières Nations triompher dans ce plan. Et c’est merveilleux de voir l’héritage de cet immense territoire protégé. »

David Loeks, ex-président, Commission d'aménagement du bassin de la rivière Peel

La Commission d’aménagement du bassin de la rivière Peel est créée en 2004, selon les prévisions des ententes de revendications territoriales autochtones.

Le plan final déposé en 2011 suggère la protection de 80 % du territoire. Le gouvernement de l’époque s’y oppose et propose plutôt une protection de 30 %.

Des manifestations pour protéger le bassin de la rivière Peel ont été tenues de façon régulière devant l’assemblée législative et le palais de justice au fil des ans. (Philippe Morin/Radio-Canada)

La situation mène à de nombreuses manifestations citoyennes, entre autres, à l’Assemblée législative. Kate White a passé sa carrière politique à être occupée par le bassin de la rivière Peel.

« Le premier jour de la session, il y avait des centaines de personnes devant l’Assemblée qui jouaient des instruments, qui chantaient, qui faisaient du bruit. Chaque jour [dans la Chambre] entre 2011 et 2016, il y avait des gens qui portaient des chandails [avec l’inscription] Protect the Peel, Protect the plan, Protect democracy. »

Kate White, chef néo-démocrate

La crise mènera à une poursuite judiciaire intentée par quatre Premières Nations et deux groupes environnementaux jusqu’à la Cour suprême du Canada. Celle-ci confirmera la position des plaignants, à savoir que le gouvernement a manqué à ses obligations en vertu des ententes de revendications territoriales.

Enjeu électoral de trois campagnes, la ratification est une des promesses des libéraux, qui remportent les élections de 2016.

David Loeks croit que ce chapitre de l’histoire du territoire aura été, somme toute, positif.

« Ce qui a été testé et démontré, c’est l’importance de l’Accord-cadre définitif. Cet accord représente l’équivalent d’une constitution pour le Yukon. Et je crois que les gouvernements et les citoyens prendront désormais l’Accord très au sérieux. »

David Loeks, ex-président, Commission d'aménagement du bassin de la rivière Peel

Claudiane Samson, Radio-Canada

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