Mine dans le Nord canadien : « Ils ne peuvent plus nous ignorer », disent des leaders autochtones

April Martel, chef de la Première nation de K’atl’odeeche, a appuyé le chef de la Première nation de Smith’s Landing, Gerry Cheezie, en s’opposant au projet de sables bitumineux de Teck Resources en Alberta. (Radio-Canada / Kirsten Murphy (CBC))
Certains dirigeants du Nord saluent la décision de Teck Resources de Vancouver de retirer sa demande pour son projet de mine de sables bitumineux, Frontier, en Alberta, alors que d’autres s’inquiètent des répercussions économiques de cette décision.

Le chef de la Première nation de Smith’s Landing, Gerry Cheezie, qui fait partie des chefs de file des Territoires du Nord-Ouest qui se sont opposés au projet, a déclaré qu’il était heureux d’entendre la nouvelle.

Le chef Cheezie avait déploré que sa communauté n’ait pas été consultée, soulevant que les contaminants de la mine pourraient souiller l’approvisionnement en eau et que les collectivités ténoises en aval de la mine en auraient ressenti les impacts. Il voulait d’ailleurs que le gouvernement ténois intervienne.

« Le gouvernement et l’industrie doivent comprendre que nous avons des droits, des droits légaux qui ont été défendus et gagnés en Cour suprême [du Canada]. »Gerry Cheezie, chef, Première Nation de Smith's Landing

Il a par ailleurs affirmé que le rassemblement prévu mardi devant l’Assemblée législative est annulé. Le chef Cheezie compte écrire à la première ministre des Territoires du Nord-Ouest et à son cabinet pour discuter de la meilleure manière de traiter ce genre de projets avec les gouvernements autochtones.

Ce combat, tout comme celui d’autres dirigeants autochtones qui s’opposent à des projets sur leurs terres marque le « début d’une nouvelle ère », croit le chef Cheezie.

« Les gouvernements autochtones donnent le signal au gouvernement [fédéral] qu’il ne peut pas continuer à nous ignorer, ou ces choses continueront de se produire jusqu’à ce que nos griefs soient réglés », a déclaré le chef Cheezie, se référant aux barrages des voies ferrées dans le cadre du conflit entre Coastal GasLink et les chefs héréditaires de la Première Nation Wetʼsuwetʼen.

L’emplacement proposé pour le projet Frontier comprend des milieux humides et des forêts anciennes qui risquent de disparaître sur des milliers d’hectares de superficie. (Louis Blouin/Radio-Canada)
Sentiment mi-figue mi-raisin

La chef April Martel de la Première Nation de K’atl’odeeche près de Hay River, qui a soutenu le chef Cheezie, a déclaré qu’elle était heureuse d’apprendre que le processus avait été interrompu. Cependant, elle pense qu’à l’avenir, les dirigeants du Nord doivent établir un plan pour participer au processus de réglementation.

« Nous sommes ravis que le processus soit abandonné. Vous savez, il faut avoir 10 pas d’avance sur eux. »April Martel, Première Nation de K'atl'odeeche

La députée de la circonscription territoriale de Thebacha et ancienne chef de la Première Nation de Salt River, Frieda Martselos, a déclaré que la décision augure mal pour l’économie canadienne. Elle croit, par ailleurs, que le pays a besoin d’un leadership fédéral plus fort.

« Lorsque de grands projets sont retirés, cela a une incidence sur l’économie », estime-t-elle ajoutant que ce genre de virevolte touche davantage les « petits gars que les grands ».

« De la façon dont les choses se passent au Canada, nous n’aurons pas [une] économie. Personne ne voudra venir investir ici. (…) C’est un peu effrayant parce que les gens doivent encore mettre de la nourriture sur la table. »Frieda Martselos, députée de la circonscription territoriale de Thebacha
Une bonne décision, mais tout n’est pas gagné

Le chef national déné Norman Yakeleya félicite la compagnie vancouvéroise Teck Resources, car, déclare-t-il par communiqué de presse, le projet polarisait l’opinion publique et suscitait des inquiétudes concernant la santé du bassin du fleuve Mackenzie et les décennies de répercussions environnementales des sables bitumineux, en particulier pour l’eau qui s’écoule vers le nord dans les Territoires du Nord-Ouest.

Et ce n’est pas l’annulation de la manifestation prévue demain qui doit faire baisser la garde. Le chef Yakeleya insiste sur le fait que la gestion et la protection de l’eau demeurent des préoccupations autochtones. Il rappelle en outre que de nombreux autres projets d’expansion des sables bitumineux sont à l’étude.

Les milliards de litres de résidus issus des sables bitumineux qui seraient déversés dans la rivière Athabasca et la construction du barrage du site C sur la rivière de la Paix comportent des impacts dommageables pour les modes de vie traditionnels des Dénés. Ce qui démontre l’importance de l’entente bilatérale sur la gestion des eaux transfrontalières signée entre l’Alberta et les Territoires du Nord-Ouest, croit le chef national des Dénés.

« Cet accord est notre bouclier à la frontière entre l’Alberta et les Territoires du Nord-Ouest pour aider à protéger l’eau, explique Norman Yakeleya. Les gouvernements du Nord doivent travailler ensemble pour que ce bouclier reste fort et qu’il soit amélioré. C’est pourquoi la Nation dénée accueille le premier sommet des leaders nordiques sur l’eau en octobre 2020. Ce n’est pas le moment de faire preuve de complaisance », conclut-il.

Avec les informations de Amy Tucker, Loren McGinnis, Avery Zingel, et Danielle d’Entremont

Radio-Canada

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