Refus d’admission à l’école francophone : la première ministre des T. N.-O. s’explique

L’ancienne ministre de l’Éducation, Caroline Cochrane, est aujourd’hui première ministre des Territoires du Nord-Ouest. (Mario De Ciccio/Radio-Canada)
Plus d’un an après le début de la saga judiciaire, la première ministre des Territoires du Nord-Ouest, Caroline Cochrane, explique sa décision déboutée en cour la semaine dernière de refuser l’admission d’enfants de parents non-ayants droit dans des écoles francophones.

La Cour suprême des Territoires du Nord-Ouest a statué que l’ancienne ministre de l’Éducation, aujourd’hui première ministre, avait erré en refusant l’admission de six enfants dans des écoles francophones du territoire l’été dernier, qualifiant ces décisions de « déraisonnables ».

Ces demandes d’admission se retrouvent ainsi devant le nouveau ministre de l’Éducation, R.J. Simpson, qui travaille par ailleurs à l’élaboration d’un nouveau règlement pour encadrer les admissions dans les écoles francophones d’ici la fin de l’été.

L’École Allain St-Cyr est l’une des deux écoles francophones dans les T.N.-O. (Mario De Ciccio / Radio-Canada)

Le vidéojournaliste Mario De Ciccio s’est entretenu avec la première ministre, Caroline Cochrane.

Q. Comment répondez-vous à ce jugement?

R. Je respecte le système judiciaire. Je crois que c’est important, donc je ne commenterai pas les [raisons] du jugement, mais je dirai ceci : à titre de ministre de l’Éducation à l’époque, je travaillais avec les meilleures informations que je détenais. […] Il m’a fallu prendre plusieurs facteurs en considération : la communauté, la préservation des langues autochtones. En tant que femme autochtone, la préservation de la langue était un aspect crucial.

Peut-être ai-je erré dans la mauvaise direction, mais je crois qu’il vaut mieux se trouver du côté de la prudence. Comme les statistiques montraient que le français se portait bien et en raison des risques dans d’autres provinces, j’ai pris la décision que j’ai prise.

Mais je suis très contente que le ministre actuel de l’Éducation ait plus de temps pour reconsidérer la question. Je sais qu’il a changé la directive et qu’il travaille avec les intervenants pour améliorer la question des admissions. Si j’avais eu plus de temps, j’aurais fait la même chose.

L’audience commune pour les demandes de révision judiciaire a eu lieu le 17 juin à Yellowknife, même si tous les participants y ont assisté à distance à cause des mesures sanitaires. (Mario de Ciccio/Radio-Canada)
Q. C’est la deuxième fois que les tribunaux concluent que votre décision était « déraisonnable » […] En tant que première ministre, est-ce que cela ternit votre processus décisionnel?

R. Encore une fois, je prends mes décisions en fonction des meilleures informations que je détiens sur le moment. Je demande aux ministères de me donner les bons côtés, les mauvais et les pires, de me donner tous les angles possibles. Mais parfois, ces décisions doivent être prises très rapidement et, dans ce cas-ci, il s’agissait d’une urgence, puisque les classes débutaient peu de temps après et qu’il faut du temps pour procéder à de bons changements.

Il s’agit d’une décision prise au terme du dernier gouvernement, et ça m’a coûté cher, je le reconnais. Mais en tant que politicienne, il est plus important, selon moi, de me tenir à ce que je crois éthique. Si je dois être jugée par le public, je veux être jugée sur ce que je crois être la bonne chose à faire plutôt que de plier en raison de la politique.

Des élèves dans une classe de l’École Allain=St-Cyr à Yellowknife. (Mario de Ciccio/Radio-Canada)
Q. Mais les gens peuvent se demander pourquoi devoir retourner devant les tribunaux plutôt que de dépenser ces milliers de dollars directement en éducation?

R. Un engagement que j’ai pris à titre de première ministre est de mieux travailler avec les différents intervenants, d’améliorer la communication et les relations à l’avenir. Il y aura certes des embûches en cours de route et de vieilles [rancoeurs] sur la façon de faire. Mais nous sommes ici pour changer le système et nous ne pouvons pas le faire seuls.

Je suis vraiment ravie que la Commission scolaire francophone des Territoires du Nord-Ouest (CSFTNO) ait accepté de s’asseoir à la table pour travailler avec le ministre. Si nous l’avions fait tout au début, les choses auraient peut-être été différentes. J’ai bon espoir que cette nouvelle directive, en discutant avec tous les intervenants, saura répondre aux besoins de tous, et surtout de ceux des élèves.

Q. Qu’avez-vous à dire à ces élèves et leurs familles?

R. Je présente mes excuses à tous ces élèves qui ont dû porter cette cause. […] Mais je veux le réitérer, en tant que femme autochtone dont le peuple a été opprimé, ce n’est qu’à travers ceux et celles qui sont prêts à se tenir debout et à accepter la lutte que le système pourra changer.

« Bien qu’il y ait eu de la souffrance, la force dont ont fait preuve ces élèves et ces familles est remarquable et je les en remercie. » Caroline Cochrane, première ministre des T. N.-O.
L’École Boréale à Hay River est une des deux écoles francophones des T.N.-O. (Mario de Ciccio/Radio-Canada)
Q. Vous admettez qu’il s’agissait d’une erreur?

R. J’admets que l’affaire n’aurait pas dû se retrouver devant les tribunaux. L’erreur était que les résultats m’ont été transmis trop [tard] pour pouvoir prendre une décision de manière informée. Il n’y avait qu’une semaine ou deux avant le début des classes si je me souviens bien. L’erreur était que le ministre précédent ne s’était jamais assis avec la commission scolaire.

Donc, oui, il y a eu des erreurs tout au long, mais les erreurs existent pour vous démontrer qu’un changement est nécessaire et ce gouvernement reconnaît que le changement est nécessaire. On peut vivre dans le passé […] ou regarder vers le futur […].

Q. Est-ce que le ministre devrait admettre devant ces élèves?

R. C’est une bonne question pour le ministre de l’Éducation. Je vous suggère de lui donner du temps pour y réfléchir et lui poser la question.

Mario De Ciccio, Radio-Canada

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