Dans le Grand Nord canadien, former la prochaine génération de jeunes leaders musicaux
Plusieurs mois après avoir remporté le prix Inspiration Arctique, l’Iqaluit Music Society prépare une formation musicale ancrée dans la culture inuit dans l’espoir d’établir la prochaine génération d’enseignants en musique au Nunavut.
La présidente de l’Iqaluit Music Society, Darlene Nuqingaq, rêve depuis longtemps que la musique occupe plus de place dans les salles de classe du territoire.
« L’enseignement de la musique améliore l’estime de soi, l’alphabétisation et la numératie chez les jeunes enfants », affirme cette ancienne enseignante et directrice d’école, qui se décrit comme une « passionnée de musique ».
Avec ses chants de gorge et ses tambours traditionnels, la musique occupe une place importante dans la culture inuit. Pourtant, Mme Nuqingaq souligne que le Nunavut ne dispose ni de cursus scolaire musical ni d’infrastructures destinées aux arts de la scène.
De plus, dit-elle, il existe peu de ressources pédagogiques pour enseigner cette discipline à des jeunes, au territoire.
« Les gens qui souhaitent enseigner la musique sont laissés à eux-mêmes », soutient-elle. « La barre est placée si haute qu’il serait difficile, pour des étudiants du Nunavut, de s’inscrire à un programme de musique [dans le Sud]. »
Enseigner différemment les chants de gorge
Le prix de 1 million de dollars qu’a reçu l’organisme à but non lucratif en février lui a donné l’élan espéré pour « combler un besoin » dans le territoire, selon Darlene Nuqingaq. « Depuis 25 ans, nous étions sans cesse à la recherche de financement. »
Avec cette somme, l’Iqaluit Music Society a mis sur pied un programme de musique parascolaire qui incorpore des éléments de la musique inuit traditionnelle.
Molly Ell, l’une des instructrices de ce programme, enseigne la danse du tambour et les chants de gorge à des enfants de l’école Nakasuk d’Iqaluit. En raison des restrictions sanitaires, elle raconte avoir dû faire preuve d’ingéniosité pour donner ses ateliers de chants de gorge.
« J’ai décidé de créer des partitions de chants de gorge pour les enfants parce qu’il est devenu très difficile de voir quoi que ce soit lorsqu’on porte un masque », explique-t-elle. « Il arrive que [les enfants] ne comprennent pas ce que l’on dit, puisqu’ils ne voient pas nos lèvres bouger. »
Selon Molly Ell, la culture inuit s’appuie traditionnellement sur la transmission orale du savoir, mais ses partitions lui permettent d’incorporer une touche de modernité à ses ateliers. « De cette manière, [les enfants] peuvent voir, plutôt que seulement entendre », soutient-elle.
Elle indique que cette partition pourrait constituer l’une des ressources pédagogiques qu’élabore actuellement l’Iqaluit Music Society pour former de jeunes leaders musicaux dans des collectivités du Nunavut situées à l’extérieur de la capitale.
Cette formation, qui devrait être prête d’ici l’été 2022, comprendra à la fois des ressources imprimées et des vidéos.
« Quand les jeunes enfants à qui j’enseigne deviendront grands, ils deviendront peut-être à leur tour des enseignants », espère Molly Ell. « De cette manière, ce cycle se transmettra d’une génération à une autre. »