Le pape François présente ses excuses aux Autochtones canadiens
Le pape François a présenté ses excuses aux Autochtones canadiens pour les mauvais traitements subis par des membres de l’Église catholique au cours d’une rencontre avec la délégation venue au Vatican.
Puis, il a enchaîné : « Et je me joins à mes frères évêques du Canada pour vous présenter mes excuses. » En septembre 2021, et pour la première fois publiquement, les évêques catholiques du Canada avaient présenté leurs excuses.
Ces excuses ont été accueillies très favorablement par les trois délégations.
Sur le moment, a-t-il précisé, il n’a pas pu s’empêcher de penser « à la façon dont les gens peuvent changer le monde et comment les individus peuvent voir qu’il existe une justice et qu’il existe un chemin vers la justice ».
« Quelle journée! C’est une grande journée », s’est exclamé Phil Fontaine, le leader autochtone qui pensait ne jamais entendre des mots d’excuse de la part du pape. Il travaille à cela depuis des dizaines d’années.
Selon la présidente du Ralliement national des Métis, Cassidy Caron, « profondément touchée » par les excuses, la réconciliation n’a pas commencé ni fini ici. Néanmoins, « les paroles prononcées par le pape aujourd’hui sont assurément historiques. Ils étaient nécessaires et je les apprécie profondément », a-t-elle poursuivi.
Le chef de la délégation des Premières Nations, Gerald Antoine, a reçu ces excuses comme des traces fraîches d’orignal dans la neige et qu’il faut nourrir la famille. « Je vois les possibilités qui s’offrent, mais il y a encore du travail à faire », a lancé le chef déné.
Une venue au Canada cet été
Les trois délégués ont en effet rappelé qu’ils souhaitent que le pape s’excuse lors de sa venue au Canada.
Le pape a en effet confirmé qu’il viendrait au Canada, sans préciser exactement quand, mais a dit : « pas en hiver », sous le ton de l’humour. Le pape a parlé de la période aux alentours de la Sainte-Anne, célébrée le 26 juillet. Il s’agit d’une fête importante pour les Premières Nations, en particulier pour les Innus qui se réunissent au Québec à Sainte-Anne-de Beaupré, y établissant même campement traditionnel.
Les délégués autochtones ont aussi fait part de leur désir de s’impliquer dans la planification de ce voyage. « Nous voulons être des partenaires actifs dans la planification, mais aussi du choix des sites et lieux que le pape visitera. Pourquoi? Parce que c’est notre maison », a lancé Gerald Antoine. Si ce n’est pas le cas, « ce serait une déception », a-t-il précisé.
Cassidy Caron a vu les larmes jaillir des yeux de la survivante de pensionnat, Angie Crerar, quand le pape a présenté ses excuses, un moment très émouvant. Raison pour laquelle, elle va continuer de plaider pour que « le pape vienne partager ses mots, ses sentiments » au Canada, car « ces mots vont être importants pour les survivants ».
Ils ont aussi rappelé attendre des actions concrètes de la part du pape et de l’Église. Les délégations Inuit, Métis et des Premières Nations avaient, chacune, présenté des récits et des demandes au pape plus tôt cette semaine.
Le pape François a d’ailleurs, dans son discours, encouragé les évêques et les catholiques « à prendre des mesures pour la recherche transparente de la vérité et à promouvoir la guérison des blessures et la réconciliation ».
Un pape indigné et honteux
En écoutant les voix des Autochtones venus raconter leurs récits, le pape a dit avoir été « profondément attristé par les histoires de souffrance, d’épreuves, de discrimination et de diverses formes d’abus que certains d’entre [eux] ont subies, particulièrement dans les pensionnats ».
« Tout cela m’a fait ressentir très fortement deux choses, l’indignation et la honte », a-t-il répété plusieurs fois. « J’ai honte. »
Lors de son discours, il s’est dit frappé par la sagesse traditionnelle qu’il a entendue lors des trois rencontres distinctes avec les Métis, les Inuit et les Premières Nations.
« Une belle image revenait sans cesse. Vous vous êtes comparés aux branches d’un arbre. Comme ces branches que vous avez déployées dans différentes directions, vous avez connu différentes époques et saisons et vous avez été secoués par des vents puissants. Pourtant, vous êtes restés solidement ancrés à vos racines, que vous avez gardées fortes », a dit le pape.
Néanmoins, il a enchaîné en lançant que « cet arbre, riche en fruits, a subi une tragédie » qui a été décrite par les Autochtones ces derniers jours : « le drame du déracinement ».
Par ce fait, a affirmé le pape, « un grand tort a été causé à votre identité et à votre culture. De nombreuses familles ont été séparées. La communauté et un grand nombre d’enfants ont été victimes de ces tentatives d’imposer une uniformité basée sur la notion que le progrès passe par la colonisation idéologique ».
« Malheureusement, cette mentalité coloniale est encore très répandue », a-t-il poursuivi.
Danses, tambours et violons devant le pape
Près de 200 personnes, en très grande majorité des membres de Premières Nations, des Inuit et des Métis du Canada, ont assisté à l’audience publique avec le pape François. Une audience qui s’est tenue après une série de rencontres avec chaque délégation et au cours desquelles il a été question des pensionnats pour Autochtones et de leurs impacts.
La dernière audience a eu lieu dans la Sala Clementina, l’une des salles du palais apostolique, située à côté de la basilique Saint-Pierre au Vatican. Cette salle est utilisée par le pape pour des réunions d’une importance particulière, notamment avec le corps diplomatique.
Des prestations de tambour inuit, de danses et de violons ont eu lieu, ainsi qu’une distribution de cadeaux. Un livre contenant des témoignages et une paire de raquettes traditionnelles ont notamment été remis au souverain pontife.
Le pape a conclu l’audience par un petit geste de la main en lançant : « bye-bye » avec un sourire.
Juste avant de rencontrer le pape, la Métisse Brianna Lizotte s’est dite nerveuse et fébrile, car elle devait jouer du violon. « Je vais imaginer mes ancêtres et ma famille jouer avec moi », a-t-elle lancé.
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