Les lacs de l’Arctique tendent à s’assécher, révèle une étude

Vue aérienne d’un lac de l’Arctique presque complètement asséché (David Swanson/National Park Service)
De récents travaux montrent qu’une grande partie des lacs des régions arctiques ont diminué en superficie au cours des 20 dernières années, ce qui serait une conséquence du réchauffement climatique et de la fonte du pergélisol.

Les chercheurs américains ont utilisé des images satellites d’une grande portion de l’espace arctique en Russie, en Alaska, au Groenland, au Canada et dans les pays nordiques, couvrant la période de 2000 à 2021.

Ils ont noté une diminution de la taille des lacs, ou même un assèchement complet des plans d’eau, dans 82 % de l’espace à l’étude. 

Une théorie prévalente voulait que les lacs de la toundra augmentent graduellement en superficie au courant de ce siècle en raison du réchauffement accéléré et de la fonte du pergélisol, note l’équipe d’Elizabeth Webb, biologiste à l’Université de la Floride.

Or, les chercheurs constatent dans cette étude que c’est plutôt l’inverse qui se produit. Ils avancent que le dégel du pergélisol contribue à réduire la superficie des lacs en créant des canaux de drainage et en augmentant l’érosion des sols au fond des plans d’eau.

Les lacs représentent entre 20 et 40 % des basses-terres de l’Arctique, soulignent les scientifiques, constituant les pierres angulaires de l’écosystème arctique.

Ils représentent une source essentielle d’eau douce pour les communautés et les industries autochtones locales. Nombre d’espèces menacées ou en voie de disparition, dont des oiseaux migrateurs et des poissons, dépendent également des habitats de ces lacs pour leur survie, notent les chercheurs.

« Nos résultats suggèrent que le dégel du pergélisol se produit encore plus rapidement que ne l’avait prévu [la communauté scientifique]. Cela indique également que la région est probablement en voie de connaître un drainage à grande échelle », remarque Elizabeth Webb, dans un communiqué.

Sur cette carte, les zones où les lacs ont perdu en superficie de 2000 à 2021 sont représentées en jaune (légère perte) ou en brun (perte plus marquée). Les zones où les lacs ont gagné en superficie sont représentées en turquoise clair ou foncé. (Webb et al., Nature Climate Change)
Plus de pluie, plus de fonte

En plus de la hausse des températures de surface, les changements climatiques entraînent plus de précipitations sur les régions arctiques à l’automne, remarquent les chercheurs. Cela accentuerait l’effet de drainage au fond des lacs, car l’eau de pluie est plus chaude que le sol et contribue ainsi à accélérer la fonte. De fortes pluies soudaines créent aussi un ruissellement qui amplifie le phénomène d’érosion. 

Certains modèles climatiques qui servaient jusqu’ici à prédire les fluctuations futures dans les lacs de l’Arctique ne tenaient pas compte de ces précipitations accrues en automne en raison du réchauffement, soulignent les chercheurs.

« Cela peut sembler contre-intuitif que l’augmentation des précipitations réduise les eaux de surface », dit Jeremy Lichstein, coauteur de l’étude. « Mais il s’avère que l’explication physique figurait déjà dans la littérature scientifique : l’eau de pluie transporte la chaleur dans le sol et accélère le dégel du pergélisol, ce qui peut ouvrir des canaux souterrains qui drainent la surface », poursuit-il.

La fonte du pergélisol, qui contient de la matière organique gelée et du méthane en profondeur, n’est pas de bon augure pour le climat, rappellent les scientifiques. En effet, lorsque le pergélisol a fondu, les microorganismes se mettent alors à dégrader cette matière organique rendue disponible en émettant des GES. Le méthane emprisonné dans le sol peut lui aussi être relâché, ce qui amplifie le phénomène de réchauffement.

Les chercheurs notent toutefois que la tendance à une réduction de la superficie des lacs n’est pas un phénomène touchant de façon égale toutes les régions à l’étude. Certaines connaissent même un certain accroissement de la surface de leurs lacs.

Ainsi, la réduction de la taille des lacs touche plus fortement le nord du continent eurasiatique que le nord du continent américain, soulignent les chercheurs, possiblement parce que la zone eurasiatique à l’étude a une plus grande concentration de lacs de thermokarst, formés par le dégel du pergélisol, écrivent-ils.

L’étude est parue dans la revue Nature Climate Change.

2 réflexions sur “Les lacs de l’Arctique tendent à s’assécher, révèle une étude

  • mercredi 7 septembre 2022 à 17:18
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    Oui le Bouclier Canadien a un substrat de roches cristallines et selon les zones les lacs sont absorbés par un substrat de sol gelé en permanence en phase de fonte ou non si ces lacs sont sis sur un fond rocheux. La géologie du nord canadien peut ainsi contribuer à la préservation d’une certaines quantité de plans d’eaux.

    Avec la pénurie d’eau douce qui nous guète, il faudrait commencer à envisager à récupérer de toutes les manières imaginatives possibles les eaux de fonte des glaciers continentaux et la redistribuer aux populations assoiffées. Sinon des flux migratoires sans précédents et impromptus se mettront en mouvement dans des directions non souhaitables et viendront changer plus tôt que tard la géopolitiques mondiales. Ainsi le Canada pourrait devenir l’eldorado des populations assoiffées du sud de toute l’Amérique du nord.

    La science a toujours décrite avec grande exactitude et observation les phénomènes qui dérègles nos vie. Mais il faut plus que la science pour trouver des solutions à long terme pour éviter l’assèchement de la Terre. La menace est immense et incalculable et les solutions doivent être équivalente. En anticipant ce qui nous guète, l’Islande possédant le Groenland sera bientôt un acteur sans précédent dans la préservation des eaux douces de fonte de leur glacier continentaux avant que ces eaux douces bientôt tellement convoitées ne se jettent dans les profondeurs salines des océans périphériques. Le Canada aussi devra récupérer ses eaux de fontes et pourraient les redistribuer aux nations assoiffées avant que ces fontaines de vie ne soit bu par le sol.

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  • vendredi 9 septembre 2022 à 05:14
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    Il faudrait bien étudier l’hydrologie du Québec avant de construire de nouveaux barrages électriques inutilement si les réservoirs sont condamnés à l’assèchement.

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