Grâce à l’IA, des chercheurs mesurent l’épaisseur de la banquise arctique toute l’année

blogue-fonte-glaces-arctique-qui-gerera-nouvel-ocean-navigable
La glace de mer à la fin mars autour de l’île d’Ellesmere, dans l’Arctique canadien. (Mario Tama/Getty Images)
Une nouvelle technique développée par une équipe internationale permet de mesurer l’épaisseur et donc le volume de la glace de mer même pendant les mois d’été où elle se fait toujours plus rare, ce qui pourrait améliorer les transports et la recherche sur le climat.

Depuis les années 80, des systèmes de radars embarqués dans les satellites permettent de mesurer du haut du ciel l’étendue et l’épaisseur des glaces sur la planète, ce qui sert à la sécurité du transport maritime, à l’élaboration de modèles climatiques et aux prévisions météorologiques, notamment. Plus récemment, des systèmes lidars (qui utilisent un laser), se sont ajoutés aux instruments de lecture.

On a ainsi pu observer la diminution globale de l’étendue des glaces depuis 40 ans.

Or, les satellites ne permettaient jusqu’ici que de mesurer avec précision le volume des glaces entre les mois d’octobre et de mars, soit, en gros, durant l’hiver arctique. Les radars et lidars parviennent à capter la hauteur de la glace flottante au-dessus de la surface de la mer, ce qui permet de connaître le volume de glace total en effectuant des calculs.

Durant les mois d’été, le mélange de neige et d’eau de fonte qui recouvre la surface de la banquise empêchait les satellites de bien mesurer l’épaisseur des glaces. Les instruments avaient de la difficulté à distinguer la surface océanique de la surface « mouillée » de la glace flottant sur l’océan. En hiver, ce problème ne se pose pas, car la glace est bien froide et « sèche », donnant une bonne lecture satellitaire, expliquent les scientifiques dans un communiqué.

Pour les mois d’été, la communauté scientifique se basait donc sur des estimations, faites à l’aide de photographies aériennes ou de relevés effectués sur place.

Entraîner un algorithme

L’équipe de Jack Landry, chercheur en environnement et géographie affilié à l’Université de Bristol, au Royaume-Uni, et à l’Université de Tromsø, en Norvège, a eu l’idée de recourir à l’intelligence artificielle et l’apprentissage machine pour remédier au problème.

Elle a entraîné un ordinateur à reconnaître des lectures radar qui auraient été considérées auparavant comme « erronées », et à les associer à une bonne lecture de la surface de la glace de mer en été. Elle a procédé en créant des simulations du type d’écho radar que reçoit l’instrument lorsque la surface est rugueuse, mouillée ou constituée d’eau profonde, par exemple.

L’image montre la fonte des glaces de mer dans l’Arctique. On peut voir de petits étangs qui se forment sur la glace. Ceux-ci compliquent la tâche des satellites pour mesurer l’épaisseur de la glace. (Esther Horvath/Alfred-Wegener-Institute)

Les chercheurs ont aussi réanalysé des milliers de lectures enregistrées depuis les dernières décennies. Avec cet apprentissage machine, l’ordinateur vient à savoir différencier automatiquement une lecture de la surface océanique d’une lecture de banquise « mouillée ».

Ceci permet de calibrer les instruments des satellites et de générer dorénavant des lectures valides et donc de connaître les volumes de glaces précis même durant l’été arctique.

« En utilisant les nouvelles données satellitaires, nous sommes enfin en mesure de faire des prévisions de glace de mer basées sur l’épaisseur de la glace, non seulement pour l’hiver, mais aussi pour l’été. Cela réduira les risques pour la sécurité des navires et des bateaux de pêche », affirme Jack Landy dans le communiqué.

En effet, les transporteurs qui naviguent dans les eaux du Grand Nord doivent être en mesure de connaître l’emplacement et l’épaisseur des glaces pour déterminer la route optimale à suivre et éviter les accidents. Des communautés nordiques dépendent aussi des informations sur les glaces pour pouvoir se déplacer dans cet environnement.

Finalement, savoir ce qu’il reste de glace à la fin de l’été permet de déterminer le volume présent à l’automne, lorsque la nouvelle glace commence à se reformer. 

« Les nouvelles données peuvent être utilisées dans des modèles climatiques avancés pour améliorer nos prévisions météorologiques et climatiques », expliquent les chercheurs.

« Lorsque nous utilisons les nouvelles données d’épaisseur de glace dans des modèles climatiques avancés, cela améliore à la fois nos prévisions à court terme pour la météo aux latitudes moyennes et les prévisions à long terme qui montrent quel climat nous aurons à l’avenir », affirme Michel Tsamados, professeur au University College de Londres et co-auteur de l’étude parue dans la revue Nature.

Au cours de la dernière décennie, l’épaisseur de la banquise arctique a été en moyenne de 1,87 mètres en mai (juste avant la fonte estivale) et de 0,82 mètres en août (juste avant la saison froide).

Selon la NASA, l’étendue de la glace de mer arctique en été a diminué de 13 % en moyenne par décennie en raison du réchauffement climatique.

Les spécialistes du climat prévoient qu’à partir du milieu du siècle, l’Arctique pourrait connaître un été sans glace de mer

Vous avez remarqué une erreur ou une faute ? Cliquez ici !

Laisser un commentaire

Note: En nous soumettant vos commentaires, vous reconnaissez que Radio Canada International a le droit de les reproduire et de les diffuser, en tout ou en partie et de quelque manière que ce soit. Veuillez noter que Radio-Canada ne cautionne pas les opinions exprimées. Vos commentaires seront modérés, et publiés s’ils respectent la nétiquette.
Nétiquette »

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *