L’enquête sur les enfants placés dans des foyers débute dans le Grand Nord canadien
Le gouvernement du Nunavut a mandaté un avocat externe pour faire la lumière sur le placement de huit enfants du territoire dans des foyers de groupe à Airdrie, en Alberta, qui ne détenaient pas de permis valides pour les accueillir.
Le gouvernement précise que, cette semaine, il a octroyé un contrat à un avocat en droit administratif pour mener l’enquête interne demandée par le premier ministre, P.J. Akeeagok, à la fin du mois de mars, à la suite d’allégations mises en lumière dans une enquête de Radio-Canada.
« Le gouvernement du Nunavut a retenu les services d’un avocat expérimenté pratiquant le droit administratif afin […] de déterminer les circonstances entourant cette question, ce qui s’est passé et comment notre gouvernement peut faire mieux à l’avenir », a déclaré Beth Brown, attachée de presse du premier ministre.
Le 29 mars, une enquête de Radio-Canada a révélé que le gouvernement du Nunavut a placé huit jeunes sous la protection des Services à la famille dans des foyers de groupe qui ne détenaient pas de permis en Alberta au cours de la dernière année.
L’entreprise qui gérait ces foyers n’avait pas les permis nécessaires pour les accueillir et, selon des informations obtenues par Radio-Canada, l’Alberta n’a été informée de la présence de ces enfants sur son territoire que plusieurs mois après leur arrivée.
« Lorsque la nouvelle est sortie, il était très important pour nous de nous assurer que les enfants étaient en sécurité et d’agir immédiatement », soutient le premier ministre.
Le ministère des Services à la famille affirme que les huit enfants ont été retirés le 31 mars des foyers de groupe qui ne détenaient pas de permis et qu’ils ont été placés aux soins de l’entreprise Petmier Care, en Alberta.
« Depuis, nous travaillons étroitement avec le ministère des Services à la famille et leur offrons du soutien pour qu’ils disposent des outils nécessaires pour continuer leur travail important », ajoute le premier ministre.
David Akeeagok était le ministre par intérim des Services à la famille du Nunavut au moment de son entrevue avec Radio-Canada, le 20 avril. Il a assuré que le ministère ne se limitera pas aux recommandations de l’enquête interne pour réviser ses protocoles liés aux placements hors territoire. « Le ministère des Services à la famille vérifie aussi ses procédures pour s’assurer que cela ne se reproduira pas », a-t-il déclaré.
Un processus de plusieurs mois
P.J. Akeeagok mentionne que, depuis qu’il occupe ses fonctions de premier ministre, c’est la première fois qu’il demande la tenue d’une enquête interne « de cette envergure ».
Cette dernière s’échelonnera sur une période de quatre à cinq mois et sera structurée en quatre catégories.
L’enquête établira le fil des événements, puis se penchera sur les protocoles en place au ministère lors de placements à l’extérieur du Nunavut. Elle doit aussi examiner si ces protocoles ont été respectés, à l’issue desquels seront colligées une série de recommandations.
Le rapport final ne sera toutefois pas rendu public, selon le premier ministre.
P.J. Akeeagok ajoute que les recommandations lui permettront de définir les besoins futurs du ministère des Services à la famille. « Lorsque nous aurons en main le rapport, je pense qu’il va nous permettre de déterminer s’il y a vraiment des lacunes ou si des ressources supplémentaires [sont nécessaires] », dit-il.
Lacunes systémiques
Les problèmes du système de protection de l’enfance du Nunavut ne datent pourtant pas d’hier.
Dans deux rapports d’audits, en 2011 et en 2014, le vérificateur général du Canada a conclu que de nombreuses lacunes persistaient au sein du ministère de la Santé et des Services sociaux. Il a notamment constaté que le Nunavut ne vérifiait pas systématiquement qu’un foyer de groupe extraterritorial disposait d’un permis d’exploitation valide, délivré par l’autorité de la province où il était situé.
Un troisième rapport est par ailleurs attendu dans les prochaines semaines.
Bien qu’il fasse preuve de réserves avant la clôture de l’enquête interne, le premier ministre reconnaît que les défis du ministère des Services à la famille sont multiples, et les ressources, limitées.
« Le manque de ressources de ce ministère n’est pas un secret », souligne-t-il. « À l’heure actuelle, nous n’avons pas la capacité de fournir des soins spécialisés. Et, d’ici là, nous devons compter sur des services à l’extérieur de notre territoire pour fournir des niveaux très particuliers de soins. »
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