Un premier programme en français ouvre finalement ses portes à Dawson
Après quelques soubresauts et une poursuite judiciaire, le nouveau programme d’enseignement en français de Dawson a finalement vu le jour. Depuis près d’un mois, les enfants francophones de la région peuvent y faire leur apprentissage dans la langue de Molière, au grand bonheur de leurs parents.
Caroline Roy, l’une des deux enseignantes du programme, se rend tous les matins dans les locaux du Centre francophone, rue King, afin d’y préparer sa classe pour la journée.
« C’est une belle aventure, c’est l’occasion d’une carrière pour moi. C’est quelque chose d’assez unique dans la carrière d’un éducateur d’avoir la chance de commencer un nouveau programme », souligne celle qui a travaillé pendant des années à l’école Émilie-Tremblay à Whitehorse.
Elle n’a eu que quelques jours à son arrivée à Dawson pour préparer la rentrée scolaire, puisque l’entente qui a permis la mise en place de ce programme n’a été conclue que très peu de temps avant le début des classes.
« Certains parents ont choisi de poursuivre le gouvernement au printemps 2023 pour tenter d’assurer l’ouverture du programme cet automne. Finalement, on a réussi à négocier une entente pour les trois prochaines années », explique le directeur général de la Commission scolaire francophone du Yukon (CSFY), Marc Champagne.
Il souligne que le programme devait initialement débuter l’année dernière, mais la commission scolaire a dû retarder son ouverture afin de consulter la Première Nation Tr’ondëk Hwëch’in. L’école se trouve sur le territoire couvert par son entente d’autonomie gouvernementale.
L’entente de revendication de la Première Nation stipule que la répartition et le partage des responsabilités pour la conception, la fourniture et l’administration des programmes offerts sur le territoire traditionnel doivent être respectés. Cela exige un partenariat entre le gouvernement du Yukon et la Première Nation.
« Dans l’entente qu’on a signée avec le gouvernement du Yukon, il y a un engagement de leur part et de notre part de collaborer et de travailler avec Tr’ondëk Hwëch’in », souligne-t-il en ajoutant que ce partenariat reste encore à être défini.
L’importance d’une éducation en français pour les familles
Même si cela fait 15 ans qu’Amélie Morin vit à Dawson et que son conjoint y a grandi, la famille songeait à déménager à Whitehorse afin de pouvoir offrir une éducation en français à leurs enfants. Ce programme est donc plus que le bienvenu.
Les locaux sont à aire ouverte, aménagés avec différents coins pour permettre aux enfants de travailler sur plusieurs activités en même temps selon leur groupe d’âge.
« C’est vraiment important pour moi que mes enfants – j’ai deux enfants – sachent parler en français, qu’ils puissent communiquer avec leur grand-mère et leur arrière-grand-mère. Et de pouvoir faire ça à Dawson, c’est vraiment spécial », dit-elle.
« [Olive] adore l’école, elle revient chaque jour souriante et son français s’améliore de plus en plus », dit Amélie Morin, maman d’une élève du programme francophone
Jessy Cook a lui aussi grandi dans un univers francophone et souhaitait transmettre cette langue et cette culture à ses deux enfants.
« Une deuxième langue, ça enrichit la personne, l’esprit, le cerveau. C’est aussi la langue et la culture de mes enfants – même s’ils ne les ont pas eues jusqu’à maintenant – et pour moi c’est très important », dit-il après avoir déposé son fils à l’école.
Des défis propres à Dawson
Un peu moins d’une dizaine d’enfants sont inscrits au programme de français en langue première, de la maternelle 4 ans à la sixième année. Pour certains d’entre eux, il s’agit d’un premier apprentissage de la langue et ils ne parlent que quelques mots de français pour le moment.
« Ils n’ont jamais eu d’éducation formelle en français, donc déjà, là, c’est un défi. Mes enfants ont 6 et 8 ans et ils ne parlent pas vraiment le français, alors c’est difficile », indique Jessy Cook.
Pour les familles qui vivent de l’autre côté du fleuve, il n’est pas possible de se rendre en ville certaines saisons de l’année parce qu’elle est uniquement accessible par traversier ou par le pont de glace.
« On veut être vraiment à l’écoute des familles, on veut être flexible. On va devoir, pour certaines familles, les soutenir durant ces moments-là où ils ne pourront pas venir en personne à l’école […] Donc ça va être un apprentissage pour nous cette année, de gérer cet aspect-là », explique Marc Champagne.
Malgré tout, l’enseignante Caroline Roy n’a pas de doute que l’avenir sera prometteur pour ce nouveau programme, une fois qu’il se sera développé avec les familles et qu’il se sera adapté à la communauté.
« C’est excitant, c’est motivant, c’est un peu comme notre petite aventure du Klondike de commencer cette école-ci et de pouvoir répondre aussi au besoin des familles francophones. C’est un honneur », lance-t-elle, tout sourire.