Un projet de coopérative d’habitation comme solution au logement social au Nunavik

La coopérative Ikajurtigiit a tenu un événement à Kangiqsualujjuaq pour présenter le concept de coopérative d’habitation, en imaginant des plans de maisons avec les résidents. (Photo: Coopérative Ikajurtigiit)

La coopérative de solidarité Ikajurtigiit, qui vise à inclure les Inuit dans le domaine de la construction au Nunavik, s’est lancée dans la mise sur pied de ce qui pourrait devenir la première coopérative d’habitation de la région, afin d’offrir une solution de rechange au logement social.

Les membres d’Ikajurtigiit se sont réunis en avril dernier, à Kangiqsualujjuaq, pour présenter le concept de logement coopératif aux résidents.

Certains membres d’une famille du village se sont montrés intéressés et ont entamé les premières étapes du projet.

Ikajurtigiit a mandaté la firme d’architecture de Québec Tergos pour réaliser des schémas préliminaires.

Il en est ressorti un concept d’habitation de six logements modernes, avec un bâtiment central commun, pouvant servir à des activités familiales.

L’entreprise d’architecture Tergos a produit des schémas, basés sur les idées des futurs membres de la coopérative. (Photo: Coopérative Ikajurtigiit)

«On s’est vraiment concentrés sur leurs besoins pour développer les plans. […] On ne voulait pas les influencer et on est partis du début», explique Patrick Payette, directeur général de la coopérative de solidarité Ikajurtigiit.

Maintenant que les idées ont été mises sur papier, les membres de la coopérative s’affairent à trouver des sources de financement durable et des partenaires.

Les membres de la famille engagés dans le projet devront aussi créer leur propre entité coopérative, qui sera responsable de la gestion courante de la propriété.

Des ateliers créatifs permettaient aux résidents d’imaginer leur coopérative d’habitation idéale. (Photo: Coopérative Ikajurtigiit)

Ikajurtigiit se concentre actuellement sur des projets de rénovation de logement, en formant des charpentiers inuit directement sur les chantiers. L’entreprise coopérative aimerait faire le saut dans la construction résidentielle et prendre part à ce nouveau projet.

«Je pense qu’on pourrait passer à une autre étape et explorer la construction de maisons. […] Quoi de mieux que des Inuit, qui pourraient être impliqués dans la construction d’habitation pour d’autres Inuit? C’est bon pour notre coop, mais c’est surtout bon pour le Nord», ajoute Patrick Payette, pour qui le projet pourrait voir le jour d’ici deux à trois ans.

Un nouveau modèle

Même si le projet en est encore à ses balbutiements, le modèle coopératif suscite beaucoup d’espoir dans la région comme nouveau choix au logement social.

Pour l’instant, la majorité des résidents habitent dans des appartements à loyer modique, qui leur sont attribués par l’Office d’habitation du Nunavik.

Environ 98 % des résidents habitent dans des logements sociaux. (Photo d’archives/Radio-Canada/Félix Lebel)

L’accès à la propriété est très difficile dans la région, en raison du coût exorbitant des matériaux et de la main-d’œuvre, accentué par l’absence de route et la courte saison de construction.

Dans le contexte, pouvoir réaliser un projet coopératif, dans lequel les locataires pourraient avoir un certain contrôle sur l’apparence de leur maison, peut devenir très attrayant.

«Simplement avoir le choix sur le design de ta maison, sur les matériaux que tu utilises. Choisir aussi tes voisins, je crois que ça rend l’habitation coopérative vraiment intéressante», explique Johnny Saunder, membre d’Ikajurtigiit et électricien en construction.

Johnny Saunders, de Kuujjuaq, espère que le modèle coopératif pourra devenir une véritable solution de rechange au logement social dans la région. (Photo d’archives/Radio-Canada/Félix Lebel)

Le résident de Kuujjuaq se considère comme très chanceux d’avoir un toit à prix raisonnable offert par l’OHN, mais rappelle que ce n’est pas le cas de tout le monde.

Selon l’OHN, il y aurait environ 800 personnes en attente d’un logement dans la région.

«C’est bien d’avoir un autre choix, plutôt que d’attendre qu’ils t’attribuent un logement. Tu peux attendre plusieurs années avant d’avoir un endroit pour toi. Tu vis dans l’attente, dans des appartements souvent bondés», ajoute Johnny Saunder.

Diversifier l’offre

Bien conscient des retards avant l’attribution d’un appartement, l’OHN explore depuis plusieurs années les possibilités de diversification de l’offre en logement.

Un programme de subvention à la construction d’une propriété neuve vient par ailleurs d’être renouvelé en 2023, avec une enveloppe budgétaire de 15 millions de dollars. Le programme prévoit une subvention qui peut atteindre 75 % du coût de la construction d’une maison unifamiliale, jusqu’à un maximum de 500 000 $.

Le prix de la construction de logement augmente considérablement en raison du coût du transport par navire jusqu’au Nunavik. (Photo d’archives/Gabriel Blanchet-Neas)

Il n’existe pas pour le moment d’équivalent pour une coopérative d’habitation. L’idée soulevée par Ikajurtigiit n’est toutefois pas tombée dans l’oreille d’un sourd à l’office d’habitation.

«On croit sincèrement qu’on est à un tournant, où l’on doit réfléchir à la manière d’offrir d’autres options. Non seulement on y croit, mais ça fait partie de notre plan stratégique. C’est d’une importance capitale pour les Nunavimmiut», explique Lupin Daignault, directeur général par intérim à l’Office d’habitation du Nunavik.

Ce dernier dit trouver le projet de coopérative intéressant, mais quelques aspects restent encore à éclaircir, notamment au niveau du financement.

«La partie qui me manque aujourd’hui, c’est comment faire pour que ça soit viable au niveau du financement? […] Je ne veux pas répéter le modèle du logement social. Si on doit reproduire un modèle ou c’est le gouvernement qui doit payer 75 % de la facture, c’est un modèle qu’on connaît déjà», ajoute M. Daignault.

Ce dernier assure toutefois que l’OHN sera là comme facilitateur pour que le projet puisse avoir accès à tous les programmes de subvention auxquels il aurait droit.

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Félix Lebel, Radio-Canada

Journaliste à Sept-Îles

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