Interdiction du mazout lourd dans l’Arctique canadien en vigueur, sauf exemption

Un navire sur l'océan
Les navires qui parcourent l’océan Arctique ne peuvent plus utiliser et transporter de mazout lourd, en vertu d’une interdiction mise en place par le gouvernement fédéral, lundi. (Matisse Harvey/ Radio-Canada)

Les navires qui parcourent les eaux de l’océan Arctique ne peuvent plus utiliser et transporter de mazout lourd, un carburant pour navires très polluants. Entrée en vigueur lundi, l’interdiction fédérale vise surtout à réduire les risques de déversement.

Elle prévoit toutefois une exemption pour les navires à double coque jusqu’au 1er juillet 2029 et une dérogation pour ceux qui participent à l’approvisionnement maritime des communautés nordiques jusqu’au 1er avril 2026. Cette prolongation leur accorde ainsi plus de temps pour effectuer une transition vers des carburants moins polluants.

Le ministre fédéral des Transports, Pablo Rodriguez, a annoncé vendredi que le gouvernement allait de l’avant avec cette interdiction, adoptée en 2021 par l’Organisation maritime internationale (OMI). Une interdiction similaire est d’ailleurs en vigueur en Antarctique depuis plus de 10 ans.

L’interdiction du mazout lourd protégera l’environnement arctique et les communautés du Nord contre les effets désastreux des déversements de mazout lourd, a déclaré le ministre dans un communiqué. Le Canada collaborera toujours avec les autres pays, les résidents du Nord et les parties prenantes du secteur maritime pour protéger notre environnement pour les générations futures.

Vue d'une baie avec un navire au loin.
Un navire de ravitaillement attend dans la baie près de Cambridge Bay, en septembre 2022. (Matisse Harvey/ Radio-Canada)

Éviter les déversements

Ottawa penchait en faveur d’une interdiction progressive du mazout lourd dans les eaux arctiques depuis un peu plus de quatre ans. Le carbone noir, nom donné aux particules polluantes provenant notamment du mazout lourd qui alimente les navires, se retrouve sur la calotte glaciaire de l’Arctique et contribue à l’accélération de sa fonte.

Sa consistance unique, qui s’apparente à celle de la boue, la rend très risquée en cas de déversement dans l’environnement, affirme Andrew Dumbrille, conseiller stratégique et technique pour l’Amérique du Nord de l’Alliance pour un Arctique propre. Les probabilités d’un déversement dans l’Arctique sont relativement basses, mais les conséquences seraient dévastatrices.

La présidente du Conseil circumpolaire inuit, Lisa Qiluqqi Koperqualuk, souligne que l’État de l’Alaska a été touché par plusieurs déversements ces dernières années. « Ils ont eu un impact sur les communautés inuit et aléoutiennes et nous avons constaté l’impact dévastateur sur la culture ainsi que la mort de nombreuses espèces marines, de mammifères et d’oiseaux », dit-elle.

Je pense qu’il ne s’agit pas de savoir quel a été l’impact [dans l’Arctique], mais plutôt quand il aura lieu, poursuit Lisa Qiluqqi Koperqualuk.

Bien qu’il accueille favorablement l’interdiction, Andrew Dumbrille croit qu’elle comprend quelques « failles ».

Malheureusement, les navires de ravitaillement utiliseront toujours du mazout lourd tout en étant proches des communautés, ce qui générera du carbone noir […]. Donc, les risques d’un déversement massif demeurent, soutient-il.

En 2020, une étude du Conseil international des transports propres a montré que l’interdiction actuelle, avec ces exemptions, ne réduirait l’utilisation du mazout lourd dans la région que de 16 %.

Je pense que le gouvernement canadien doit mettre en place un cadre réglementaire qui oblige les acteurs concernés à s’y plier parce qu’ils ne le respecteront pas d’eux-mêmes, Affirme Andrew Dumbrille.

Mesure d’atténuation des coûts

David Rivest, le président du Groupe Desgagnés, qui exploite le transporteur maritime Nunavut Sealink and Supply inc. (NSSI), indique que tous ses navires peuvent faire l’objet de l’exemption de cinq ans accordée par Ottawa. Selon lui, cette dernière donnera le temps à l’entreprise de trouver une manière d’assumer les coûts supplémentaires découlant de la transition vers des carburants plus propres.

Notre objectif est de maintenir le plus bas possible les coûts d’approvisionnement dans l’Arctique, sachant que cela a un impact significatif sur nos consommateurs, promet-il. Nous devons rester aussi rentables que possible, tout en équilibrant notre responsabilité environnementale.

Bien qu’il se s’attende pas à une hausse des coûts d’approvisionnement dans l’immédiat, David Rivest croit que cette tendance pourrait changer à plus long terme, en fonction des conditions du marché.

L’Alliance pour un Arctique propre et le Conseil circumpolaire inuit craignent que la hausse des coûts d’expédition n’entraîne une flambée des prix des denrées et des marchandises dans les communautés nordiques.

C’est pourquoi ils militent pour la mise en place de mesures d’atténuation des coûts.

Il serait injuste de ne pas prévoir de plan d’atténuation des coûts, alors que tout le monde est parfaitement conscient du coût de la vie très élevé dans l’Arctique et pour les navires qui desservent les communautés inuit, soutient Lisa Qiluqqi Koperqualuk.

Cette dernière souhaite qu’Ottawa consulte des organisations inuit à ce sujet, ce que Transports Canada affirme avoir commencé à faire.

L’interdiction sera ajoutée au Règlement sur la pollution par les bâtiments et sur les produits chimiques dangereux sous la forme d’un amendement.

Avec des informations de Samuel Wat

À lire aussi :

Radio-Canada

Pour d’autres nouvelles sur le Canada, visitez le site de Radio-Canada.

Vous avez remarqué une erreur ou une faute ? Cliquez ici !

Laisser un commentaire

Note: En nous soumettant vos commentaires, vous reconnaissez que Radio Canada International a le droit de les reproduire et de les diffuser, en tout ou en partie et de quelque manière que ce soit. Veuillez noter que Radio-Canada ne cautionne pas les opinions exprimées. Vos commentaires seront modérés, et publiés s’ils respectent la nétiquette.
Nétiquette »

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *