La fumée des feux de forêt influerait sur la banquise arctique

Feux de forêt dans l’Ouest américain (Oregon State Fire Marshal/Reuters)
L’intensité variable des feux de forêt dans l’hémisphère Nord d’une année à l’autre exercerait une influence notable sur l’étendue des glaces dans l’Arctique, selon une étude parue dans la revue Science Advances. Les émanations importantes certaines années favoriseraient la formation de nuages dans le Grand Nord, ce qui ralentirait la fonte de la banquise jusqu’à un certain point.

Les chercheurs, basés à l’Université du Colorado à Boulder et au Centre national de la recherche atmosphérique, ont revisité les plus récents modèles climatiques. Ils ont constaté que l’effet de serre provoqué par l’accumulation de GES dans l’atmosphère même s’il est le principal facteur du réchauffement climatique ne pouvait expliquer entièrement les variations annuelles de la superficie des glaces sur l’océan Arctique. 

Ils ont noté que du milieu des années 1990 au milieu des années 2000, la perte décennale de glace de mer a été la plus marquée jamais enregistrée, soit un taux de diminution de 13,3 %. Cela correspondait à une période durant laquelle les feux de forêt ont été moins nombreux dans l’hémisphère nord. 

Or, du milieu des années 2000 jusqu’à la fin des années 2010, la banquise a reculé un peu moins rapidement, soit de 4 % en rythme décennal. Cette période a connu une intensité d’incendies plus grande que la moyenne.

Dans un communiqué, les chercheurs expliquent que les feux de forêt dégagent de petites particules de carbone, des aérosols et divers composés gazeux qui sont transportés par les courants atmosphériques et qui peuvent atteindre l’Arctique. Ces particules contribueraient alors à la formation de gouttelettes en suspension dans l’air et de nuages dans les hautes latitudes.  

Lorsqu’il y a beaucoup d’aérosols libérés au cours d’une année où les incendies sont intenses, cela peut conduire à des nuages ​​plus nombreux et plus épais. Or, les années où les feux de forêt se font plus rares, les nuages sont plus fins, ce qui permet à plus de rayonnement solaire de traverser l’atmosphère et de faire fondre la glace durant l’été, explique l’équipe menée par Patricia DeRepentigny, chercheuse postdoctorale au Centre national de la recherche atmosphérique.

Les scientifiques ont noté un lien entre concentration marquée d’aérosols dans l’atmosphère, la formation de nuages plus épais et des températures plus froides au sol. Mais cette relation n’est pas linéaire et beaucoup de facteurs entrent en compte, soulignent les chercheurs.

Il faut aussi noter que le climat mondial subit des variations cycliques qui s’étendent sur plusieurs années, comme le phénomène El Niño ou La Niña ou encore l’oscillation arctique. 

De multiples interactions

Par ailleurs, des travaux avaient déjà montré que le recul de la banquise dans l’Arctique accélère le réchauffement climatique et contribue à la multiplication des feux de forêt dans l’hémisphère nord, rappellent les chercheurs.

« L’Arctique est souvent vu comme cette région dont nous n’avons pas trop à nous soucier, car elle est si loin de chez nous. Mais le fait qu’il y ait cette rétroaction entre ce qui se passe ici avec les feux de forêt et la variation de la glace de mer, et le fait que la banquise qui diminue puisse engendrer plus de feux de forêt, ça nous rapproche un peu plus de l’Arctique », observe la chercheuse. 

Les chercheurs rappellent que leurs travaux sont fondés sur l’utilisation de modèles. Il reste à savoir si la relation qu’ils ont mise en lumière tiendra la route avec de nouvelles observations au fil des années. Cela leur permettra d’améliorer leur simulation. 

« L’objectif que nous visons est de rendre ces simulations climatiques plus fiables et de nous donner des projections qui peuvent ensuite éclairer les décideurs politiques et les choix de société » en ce qui concerne les changements climatiques, affirme Patricia DeRepentigny.

Par ailleurs, une étude a déjà mis en lumière un phénomène par lequel la suie (carbone noir) qui se dégage des feux de forêt et qui peut être transportée jusque dans l’Arctique peut contribuer à la fonte de la banquise lorsqu’elle se dépose sur la glace. Cela engendre une surface plus foncée qui accumule les rayons du soleil et accélère la fonte. Toutefois, l’ampleur de ce mécanisme et son impact sur le climat restent à préciser. 

À titre d’illustration, l’animation ci-dessous montre bien le déplacement de la fumée des feux de forêt dans l’est de la Sibérie vers l’Arctique, à l’été 2021.

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