Le dégel des collines arctiques serait un contributeur majeur au réchauffement

Affaissements de sol provoqués par le dégel dans le parc national Aulavik, dans le nord de l’île Banks, aux Territoires du Nord-Ouest. (Sarah Beattie/Parcs Canada)
L’affaissement du relief arctique en raison de la fonte du pergélisol libère une quantité importante de carbone d’origine organique qui, à son tour, contribue à l’augmentation des GES, selon une étude récente.

Ce carbone était enfermé dans le sol gelé depuis des milliers d’années. Toutefois, les changements climatiques, qui se font sentir plus rapidement aux pôles, accélèrent la fonte du pergélisol, rendant les composés de carbone accessible aux micro-organismes qui peuvent alors les décomposer. Ce processus rejette des GES dans l’atmosphère, essentiellement du méthane et du dioxyde de carbone.

Lorsqu’un versant de colline s’effondre et crée une falaise, cela expose une plus grande surface de pergélisol à la chaleur et aux éléments et accélère le phénomène de fonte.

Des chercheurs de l’Université de l’Alaska à Fairbanks ont étudié les changements qui se sont produits au cours d’une dizaine d’années dans le paysage du nord de la péninsule de Taïmyr, dans l’Arctique russe. 

Ils se sont concentrés sur une zone mesurant 27 000 kilomètres carrés où les affaissements de collines sont particulièrement nombreux.

Grâce à des images satellites, ils ont comparé la période 2010-2017 à la période 2018-2021. Ils ont noté que les affaissements sont passés de 82 dans la première période à 1404 dans la deuxième. Cela signifie que les effondrements de flancs de collines se sont multipliés par un facteur de 43.

Cela s’explique notamment par des températures très élevées lors de l’été 2020, précisent les chercheurs.

En ne considérant que la libération de carbone organique dans ces sols, la hausse atteint un facteur de 28.

Glissement de terrain dans un pergélisol riche en glace en Yakoutie centrale, en Sibérie (Photo : A. Séjourné, GEOPS, CNRS/Université Paris-Saclay)

Le phénomène se produit aussi ailleurs dans l’Arctique russe, dans l’Arctique canadien et, dans une moindre mesure, en Alaska, rappelle l’équipe de Simon Zwieback, professeur de géophysique à Fairbanks et coauteur de l’étude.

Les chercheurs ne sont toutefois pas en mesure de calculer précisément la quantité de GES émise en raison de ce phénomène dans la zone à l’étude. Il faudrait de plus amples travaux.

Ils notent toutefois que l’effondrement des flancs de collines représentera dans l’avenir jusqu’à 20 % des émissions issues de la fonte du pergélisol dans le Nord.

Fonte rapide

Comme les versants de collines gelées sont recouverts par une couche très mince de matière végétale, elles sont peu isolées des facteurs qui contribuent à leur fonte, remarquent les chercheurs. 

« Les régions recouvertes de pergélisol devraient changer profondément au cours des prochaines décennies. Parmi les nombreuses conséquences de cette situation, figure la libération de gaz à effet de serre […], qui peut aggraver les changements climatiques », explique M. Zwieback, dans un communiqué.

De plus, le phénomène n’est pas linéaire : les effondrements de sol peuvent se produire de façon accélérée même avec un réchauffement graduel.

« La chaleur extrême a été aggravée par le fait qu’il y a beaucoup de glace dans le sol près de la surface », mentionne-t-il.

Affaissements causés par la fonte du pergélisol dans la réserve nationale de Noatak, en Alaska. (David Swanson/National Park Service)

« Cela est dû à l’héritage des périodes glaciaires passées, mais aussi au fait qu’une grande partie de cette glace ancienne est toujours là parce que les étés sont généralement frais et qu’il n’y a pas d’incendies », poursuit-il.

En effet, une grande partie de l’hémisphère nord était recouvert d’une épaisse couche de glace lors de la dernière période glaciaire, qui a pris fin il y a environ 12 000 ans et dont les sols gelés du Grand Nord représentent les vestiges.

Les chercheurs appellent à l’incorporation du phénomène de fonte du pergélisol, et plus particulièrement de l’affaissement des collines de l’Arctique, dans les modèles climatiques afin d’obtenir un portrait plus juste de la réalité.

Les travaux sont parus dans la revue The Cryosphere.

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