Les langues autochtones doivent être mieux protégées dans le Grand Nord canadien, selon un rapport
Le rapport du Comité permanent des opérations gouvernementales portant sur la révision de la Loi sur les langues officielles des Territoires du Nord-Ouest est catégorique. La loi doit avoir plus de mordant pour protéger davantage les langues officielles autochtones.
Le comité, dans son rapport déposé récemment à l’Assemblée législative, fait un triste constat : les langues autochtones aux T.N.-O. ne génèrent pas assez de nouveaux locuteurs pour maintenir leur vitalité.
Selon l’UNESCO, citée dans le rapport, les neuf langues officielles autochtones du territoire sont menacées. En 2019, il n’y avait que 560 personnes pouvant s’exprimer en Inuvialuktun et 290 en Gwich’in.
Les membres du comité permanent ont donc déposé 13 recommandations, la majorité proposant des mesures pour assurer la transmission des langues autochtones.
Ces recommandations reflètent ce que le comité a entendu sur le terrain lors de consultations publiques entre juin 2021 et octobre 2022. Un total de 74 personnes de partout aux T.N.-O. ont participé aux rencontres.
Miser sur l’éducation
Malgré ce portrait sombre, le comité est d’avis que le potentiel de revitalisation des communautés linguistiques des T.N.-O. est grand.
Pour ce faire, le comité recommande au gouvernement territorial de mettre de côté les concepts de « demande importante » et de « vocation du bureau ». Selon ces concepts, les membres du public ne peuvent utiliser leur langue pour interagir avec le gouvernement seulement s’il y a une demande importante pour cette langue dans une communauté donnée, et si la vocation du service gouvernemental le permet.
Selon le comité, ces concepts sont flous, et tous les locuteurs d’une langue minoritaire devraient avoir le droit d’utiliser leur langue partout aux T.N.-O. et auprès de tous les bureaux du gouvernement.
Le comité estime aussi que la revitalisation des langues doit passer par le système d’éducation. Il recommande au ministère de l’Éducation, de la Culture et de la Formation de créer des programmes d’immersion de la prématernelle à la 12e année pour les neuf langues officielles autochtones.
« Il faut commencer par établir ce droit [à l’éducation en langue autochtone] et ensuite voir comment on va atteindre ce but », a mentionné Rylund Johnson lors d’une entrevue sur les ondes de l’émission de radio Trailbreaker de CBC.
Le comité recommande également que le gouvernement territorial donne accès à des cours gratuits de langue à tous les fonctionnaires autochtones qui souhaitent se réapproprier leur langue.
Aucune mention du français
Le rapport recommande que le financement des mesures de revitalisation des langues autochtones soit révisé à la hausse pour atteindre celui accordé à la langue française au territoire.
C’est la seule mention du français dans le rapport. Mais pour la Fédération franco-ténoise (FFT), certaines des recommandations pourraient avoir un effet bénéfique pour les francophones, comme celle sur l’élimination du concept de « demande importante ».
« Ça voudrait dire qu’un francophone de Fort Simpson ou de n’importe où aux T.N.-O. pourrait demander des services en français à l’extérieur des quatre communautés [de demande importante pour les francophones, soit Inuvik, Yellowknife, Hay River et Fort Smith] », dit sa présidente Audrey Fournier.
La FFT accueille ce rapport de façon positive, mais dit rester vigilant « pour rester présent sur la scène et pour ne pas qu’on nous oublie. » Audrey Fournier dit également que si les gains des francophones peuvent servir à améliorer la situation pour les langues autochtones, ce serait une victoire en soi.
Le gouvernement territorial a maintenant 120 jours pour répondre aux recommandations.
Le comité espère que certaines des mesures proposées seront mises en place rapidement, avant la fin de la 19e législature. Les élections territoriales sont prévues cet automne.
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